Vous avez déjà lu la quatrième de couverture ? Elle risque de vous donner une idée légèrement biaisée de ce roman, en vous gavant de détails pas très utiles, ou que vous n'auriez pas eu envie de connaître tout de suite. D'accord, vous devez savoir que c'est l'histoire d'un homme, un peu loser, qui traverse l'Angleterre du sud au nord, à bord d'une voiture équipée d'un GPS, lequel instrument de navigation devient son interlocuteur privilégié. Sur 450 pages, vous demandez-vous, effarés ? C'est là qu'il faut reconnaître à Jonathan Coe un talent certain pour rendre ce road-movie
intéressant, voir même passionnant. Des rencontres peu ordinaires, des échos avec l'actualité, beaucoup de scènes amusantes et pourtant une profondeur indéniable, tout cela rend la lecture fluide et captivante. D'autres histoires s'insèrent, comme celle d'un navigateur solitaire anglais, avec lequel Max ne peut s'empêcher d'établir des comparaisons : ils ont en commun la solitude, la durée incertaine du périple, le mensonge…
Ce que j'ai aimé au cours de ma lecture, ce sont aussi les réminiscences de jeunesse, sous forme de textes retrouvés. Tout jeune « il était seul au monde ; déjà, il bataillait. » La vie et la déprime de Max s'en trouvent éclairées différemment. le côté politique du roman, où l'on se souvient du Jonathan Coe, brillant critique de la société anglaise, ajoute aussi à l'intérêt et évite l'impression d'aligner des anecdotes. Quelques longueurs à peine, on dirait que l'auteur a senti l'ennui qui pointait, car le roman prend un virage inattendu, filant vers une fin qui l'est aussi ! (inattendue)
Je ne dirais pas de se précipiter sur ce livre toutes affaires cessantes, mais s'il croise votre route, surtout si vous êtes dans une période où trouver LE livre idéal est difficile, n'hésitez pas à tenter l'expérience !
C'est l'ultra moderne solitude
Après "La pluie avant qu’elle tombe", un roman dramatique et somptueux qui contrastait avec ce qu’on avait l’habitude de lire de lui, Jonathan Coe nous revient en terrain plus familier avec La vie très privée de Mr Sim. Forcément, on est un peu déçu au départ, surtout si l’on aimait la profondeur nouvelle et la gravité du dernier livre... Et puis, au fil des pages, cette sensation disparaît et il faut reconnaître qu’on s’amuse beaucoup en compagnie de cet anti-héros archi banal qui traverse l'Angleterre en tant que représentant commercial pour aller vendre les brosses à dent de son nouvel employeur. A travers cette odyssée moderne et farfelue, Jonathan Coe pointe les travers de notre société contemporaine avec un humour ravageur très britannique, assez grinçant parfois. Il égratigne notamment les nouveaux moyens de communication moderne (mail, facebook) qui renforcent notre solitude au lieu de la combler. Le roman est habilement construit, à la façon d’un puzzle, avec des pièces qui émaillent le récit pour le faire avancer : lettres, nouvelles, anecdotes, etc. J’aime beaucoup le trait d’esprit à la fin, même si je comprends tout à fait qu’on ne puisse pas accrocher. Bref, c’est un bon roman pour moi, extrêmement plaisant, même s’il ne conserve pas la même intensité que son prédécesseur.