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C'était ce Lucas, assis à ses côtés, qu'elle conduisait maintenant vers son nouveau destin. Il prenait sa place en quelque sorte et peut-être qu'un jour, elle aussi le rejoindrait. Ce jour-là, elle quitterait définitivement le deuil. L'attelage approchait de l'arrêt du car ; le soleil s'était levé. Elle sourit à l'enfant qu'elle laissait partir. Pour lui donner du courage, elle s'était interdit de s'épancher de son chagrin à elle, à la hauteur de l'amour qu'il avait toujours lu dans ses yeux.
Elle ne faillirait pas : elle avait immobilisé d'autorité le cheval, enserrant ses rênes autour d'une de ses mains et jusqu'à ce que le car arrive, elle lui avait souri en abandonnant son autre main entre ses mains à lui, en silence. Il savait ce qu'il avait à faire ; elle comptait sur lui. Il serait bientôt entre les mains de Dieu seul : "A la grâce de Dieu". Entre orangeraies et oliveraies, la famille Puig coule des jours paisibles.
Jusqu'au jour où tout bascule : la mort, cette cruelle faucheuse, frappe sans vergogne. Quelques années après le drame, on retrouve Joséphine, la benjamine. Mère à son tour, elle assiste au départ de Lucas, son fils, qui la quitte sous un ciel couleur de mort... A l'heure des réminiscences, elle nous emmène avec elle sur les traces d'un vécu riche et palpitant. Car Joséphine n'est pas de celles qui choisissent la facilité : enceinte, elle laisse pourtant partir l'homme de sa vie au bout du monde.
Consciente de sa force, elle élève seule cet enfant, qui prendra la route à son tour. Car elle sait qu'on ne peut donner que deux choses à ses enfants : des racines et des ailes... Ce sont donc des vies en équilibre sur les routes du malheur et du bonheur que nous dépeint Jacqueline Roux. Toujours avec cette capacité à retranscrire en mots les sentiments humains, terriblement complexes, elle nous prouve sa capacité à se renouveler.
La marque d'un auteur en constante évolution...