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Dans les montées, le train avait le souffle rauque et sifflant d'un septuagénaire phtisique. Aussi loin que portait la vue, ce n'était que la même savane verdoyante, boursouflée en désordre par des termitières hérissées d'arbustes. Un matin, s'étant souvenu de sa jeunesse, le soleil fut tantôt à droite, tantôt à gauche si pas devant ou nulle part, redécouvrant un colin-maillard d'un autre âge en compagnie des ramures d'arbres géants : ils formaient alors une double et sinueuse galerie autour du convoi.
Un après-midi, les deux hautes parois d'une colline que fendait la voie ne purent entraver dans leur chute un souffle humide et lourd d'effluves aquatiques ; en contrebas, le fleuve venait sur le convoi à vive allure, tout en déroulant ses eaux sombres. Des flots de végétation, que trouaient des branches d'arbres pétrifiées et nues comme un dernier geste de désespoir de la nature en dérive, essayaient de démentir l'abîme profond des eaux.
Debout de part et d'autre du pont dans leurs pirogues étroites et allongées, quelques pécheurs brandissaient, en poussant des cris stridents, des grappes de poissons dont l'oeil ovale était encore noyé de vie... "
