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A la veille de la retraite, un professeur de lettres classiques, accusé d'avoir tenu des propos racistes envers ses étudiants, préfère démissionner plutôt que de livrer le secret qui pourrait l'innocenter. Tandis que l'affaire Lewinski défraie les chroniques bien-pensantes, Nathan Zuckerman ouvre le dossier de son voisin Coleman Silk et découvre derrière la vie très rangée de l'ancien doyen un passé inouï, celui d'un homme qui s'est littéralement réinventé, et un présent non moins ravageur : sa liaison avec la sensuelle Faunia, femme de ménage et vachère de trente-quatre ans, prétendument illettrée, et talonnée par un ex-mari vétéran du Vietnam, obsédé par la vengeance et le meurtre.
Après Pastorale américaine et J'ai épousé un communiste, La tache, roman brutal et subtil, complète la trilogie de Philip Roth sur l'identité de l'individu dans les grands bouleversements de l'Amérique de l'après- guerre. Tout est équivoque et rien n'est sans mélange, car la tache "est en chacun, inhérente, à demeure, constitutive, elle qui préexiste à la désobéissance, qui englobe la désobéissance, défie toute explication, toute compréhension.
C'est pourquoi laver cette souillure n'est qu'une plaisanterie de barbare et le fantasme de pureté terrifiant".
Un roman fourre-tout
La Tache, le vingt-quatrième roman de Philip Roth (sans compter ses autres travaux), ressemble à un agglomérat de thèmes et de personnages qui lui tenaient à cœur et qu’il n’était pas parvenu à caser dans un précédent roman.
Coleman Silk, le doyen de l’université d’Athena, en Nouvelle-Angleterre, est un professeur reconnu de littérature antique, qui, du jour au lendemain, est accusé de propos racistes. Sans le soutien de la part des professeurs de sa génération, rejeté par les plus jeunes, il se retrouve seul sur le banc des accusés, à une époque où le racisme est fustigé. Vaincu, il prend sa retraite et vit isolé.
C’est en 1998 que l’écrivain Nathan Zuckermann, le héros de quelques uns des romans de Philip Roth, rencontre Coleman, son voisin à présent retraité, et s’intéresse de près à son histoire. La narration, qui fait de Nathan le témoin du naufrage personnel d’un autre personnage, est on ne peut plus classique : parfois, le « classique » a du bon ; parfois non. Les personnages « tiennent debout » davantage parce qu’ils sont brisés par un passé tragique que parce qu’ils sont décrits avec succès par Philip Roth (et la traductrice).
À travers Nathan qui raconte à la première personne, on découvre que Philip Roth ressort une énième fois la topique de l’identité : Coleman Silk n’est pas ce qu’il donne à voir. À l’âge adulte, il a enterré au fond de son être un secret, que ni sa femme ni ses enfants ne connaissent, au prix du sacrifice. Cet homme, en se réinventant, met en scène le rêve américain. Comment, lorsqu’on est défavorisé par une origine sociale ou ethnique, parvient-on à s’élever au-delà des « handicaps » et à réaliser son rêve ?
Par ailleurs, l’individu qui occupe de hautes fonctions sociales ou professionnelles se doit d’avoir une vie privée irréprochable (marié et bon père de famille) ; et lorsque la vie privée entache l’image de l’homme publique, les répercussions sociales, familiales et psychologiques peuvent être irréparables. Philip Roth a su capter l’air du temps et le puritanisme américain. Mais il a également ajouté à l’ensemble une petite touche faussement contestataire (« c’était mieux avant ») surtout à partir du dernier quart, longtemps après que l’intrigue soit tassée – quand le livre tarde vraiment à se refermer.
La suite de la critique sur mon blog :
http://bibliolingus.over-blog.fr/article-la-tache-philip-roth-115381989.html