En ouvrant Le bleu des abeilles, il ne faut pas s’attendre à un roman qui joue sur des thèmes à la mode ou qui s’essaye à des recherches syntaxiques originales. Pourtant, ce court roman est rempli de charme, dû à la simplicité et à la vérité qui en émane.
Une fillette d’une dizaine d’années doit quitter l’Argentine où son père reste emprisonné, pour rejoindre sa mère qui vit déjà à Paris. Quelques leçons de français et quelques mois plus tard, elle arrive au Blanc-Mesnil, un peu loin des quais de la Seine et de la Tour Eiffel qu’elle imaginait proches de chez
elle. Le froid de l’hiver, l’appartement dans la tour, le métro, les camarades de classe, la langue surtout, tout un nouvel univers est décrit à hauteur d’enfant mais sans mièvrerie.
J’ai vraiment passé un bon moment avec ces souvenirs pleins de délicatesse et d’émotion, aux côtés de cette petite fille très observatrice, qui grandit et change, mais garde un lien très fort avec son père au travers des lettres et de leurs lectures communes. Dans cet échange réside l’explication du titre, très joli fil conducteur du roman. Un livre à ne pas rater si les thèmes de l’enfance et de l’exil vous parlent !
Plusieurs exils...
Il y a sans doute plusieurs formes à l'exil et celui vécu dans l'enfance et dans la langue est sans doute une forme qui donne à la littérature un ton et une couleur particulière. Quelques souvenirs d'enfance peuvent en effet raconter bien des choses et même l'exil des adultes et d'un peuple d'un point de vue particulier, singulier. Adopter ce regard porté sur les choses, les souvenirs, c'est aussi se rapprocher d'un commencement, d'une découverte et les choses, comme les êtres prennent un tour singulier parfois drôle, parfois déconcertant mais tout compte, tout petit à petit prend forme et sens comme une seconde naissance à une nouvelle langue à un nouveau monde. Avec une distance qui se réduit par la parole, par l'écrit, un point de départ se fait jour et les contours d'un nouveau pays, d'une nouvelle langue se dessinent. Une suite de découvertes donc et un exil vécu dans l'enfance, une initiation à la langue, à un nouveau paysage, un livre sensible qui laisse songeur et nous ramène dans ce lieu intermédiaire de l'enfance et de l'exil...