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Un livre en forme de défi : faire revivre et donner à comprendre un personnage et une époque considérés comme familiers, et pourtant si éloignés de nous.
Sur le Grand Camée de France, on le voit chevauchant Pégase, superbe et triomphant. Il est le prince de la jeunesse, le César que Rome et le monde espèrent lorsque reviendra le temps de la liberté. Mais Germanicus, lorsqu'il meurt à Antioche en 19, à 34 ans, emporte avec lui une gloire inaccomplie.
Auréolé de vertus républicaines, de courage militaire et de maîtrise intellectuelle, le petit-fils de Marc Antoine, l'époux d'Agrippine, le père de Caligula paraît avoir brûlé les étapes. Après avoir brillé en Illyrie, c'est en Germanie qu'il se distingue, infligeant une sévère défaite au légendaire Arminius. C'est en Orient qu'il s'épanouit ensuite, faiseur de roi et de paix, populaire au point de susciter la jalousie de l'empereur Tibère, son oncle et père adoptif.
La mort le frappa en plein vol, le soustrayant peut-être au destin sanglant qui caractérise sa famille. La perte fut ressentie à la hauteur des espérances qu'il avait entretenues. Statues, bas-reliefs, médailles, inscriptions lui furent consacrés, magnifiant sa mémoire presque à l'égal d'un dieu. Et lorsque l'Antiquité se réinstalla dans la culture occidentale au XVIe siècle, le nom et la personne de Germanicus investirent la musique, la littérature et l'art bien plus que son destin l'aurait laissé supposer.
En reconstituant le parcours de Germanicus, Yann Rivière nous entraîne sur les lieux que, en ces débuts de l'Empire, Rome s'attacha à conquérir, chez les peuples divers qu'elle soumit de gré ou de force, dans les subtilités de la politique et de la religion mêlées, et au cour de cette dynastie julio-claudienne, où le génie, la folie et le meurtre se côtoyèrent.
RECOMMANDÉ PAR LE SITE CULTURE CHRONIQUE
Le dernier ouvrage de Joël Schmidt “La mort des César” raconte avec beaucoup de talent la fin des soixante dix empereurs romains qui se succédèrent à la tête de l’Empire jusqu’à sa fin. Mais il existe une catégorie de princes qui n’accédèrent jamais à la magistrature suprême alors même qu’ils en avaient l’étoffe. Ce fut le cas de Germanicus qui mourut à 34 ans à Antioche manquant une consécration qui lui tendait les bras. Yann Rivière qui connait parfaitement l’histoire politique et juridique de la Rome Antique nous propose une biographie serrée de plus de cinq cents pages de celui qui fut le petit fils de Marc Antoine, l’époux d’Agrippine et le père de Galigula.
D’emblée l’historien s’interroge. L’Empire n’aurait-il pas été plus puissant si Germanicus n’était pas mort si jeune ? Son entreprise de consolidation de la domination romaine en Orient n’aurait-elle pas été menée à son terme? S’il avait vécu, le roi des Parthes qui a pleuré sa mort n’aurait-il pas pas vécu en bonne entente avec Rome au cours des années suivantes plutôt que de s’engager dans une guerre qui vida les caisses de l’Empire pour le contrôle de l’Arménie. Toutes ces hypothèses restent évidemment au conditionnel mais elles en disent long sur la personnalité hors du commun. En effet peu de ses contemporains auraient pu imaginer que le fils de Livie et de Marc Antoine occuperait une telle place dans l’Etat Romain et qu’il contribuerait autant à la défense de l’Empire. Rappelons qu’il brilla avec ses légions en Illyrie et qu’il effaça le désastre de Varus en Germanie en infligeant une cruelle défaite au chef légendaire Arminius. La suite de son ascension se poursuit en Orient où il consolida la paix et joua un rôle politique de premier plan. Il mourut persuadé qu’on l’avait empoisonné ce qui est bien possible et ce qui ne déplut pas forcément à Tibère qui assistait l’ascension de Germanicus avec inquiétude. Reste que dans toutes les régions où il passa son souvenir resta vif longtemps après sa disparition.
Ce “Germanicus” de Yann Rivière se lit comme un roman. Nous traversons l’Empire au côté de l’un des personnages les plus flamboyants que Rome enfanta. L’ouvrage est à fois un formidable récit et une minutieuse reconstitution historique. L’un des meilleurs livres d’histoire de l’année.
Hugues DE SINGLY (CULTURE-CHRONIQUE.COM)