Les églises anciennes de Picardie, d'Ile-de-France et de Haute-Normandie ont en commun d'être bâties en pierres tendres la craie ou le calcaire lutétien qui se prêtent bien à la gravure de graffiti. Ceux-ci peuvent être très abondants, couvrant les murs extérieurs d'églises qu'entourait jadis et qu'entoure souvent encore le cimetière. D'après les dates qui leur sont associées, les gravures ont été réalisées, pour l'essentiel, aux XVIIe et XVIIIe siècles. Elles sont en majorité d'inspiration religieuse : croix innombrables, calvaires, cloches, objets du culte, représentations d'églises, voire de cathédrale A ceci s'ajoutent d'autres figurations très variées : outils et instruments divers, objets manufacturés, animaux, ainsi que différentes catégories de dessins abstraits. Ces graffiti composent tout un langage de signes et de symboles mêlant religion, croyances et superstitions. Cet ouvrage fait l'inventaire des gravures relevées sur plus de 600 églises, essentiellement dans les départements de la Somme, l'Oise, le Val-d'Oise et l'Eure, et ponctuellement clans l'Aisne, la Seine-Maritime, l'Orne, l'Eure-et-Loir, l'Indre-et-Loire et l'Yonne II met en évidence l'homogénéité fondamentale des signes gravés, ainsi que des particularismes régionaux. Pour tenter d'en saisir le sens, les graffiti sont replacés dans le contexte historique, religieux, économique et social de l'époque. Ils font ainsi entrevoir, sous un angle original, la vie des campagnes, les mentalités, les croyances et les formes de piété populaire dans le grand bassin parisien, depuis le temps de la Contre-Réforme jusqu'à la Révolution. Ces gravures ont une grande force d'évocation. Si elles nous émeuvent aussi, c'est sans doute qu'elles ne manquent pas de qualités esthétiques, mais c'est surtout parce qu'assemblées dans ces prières des murs "elles sont un acte de foi qui traverse les âges".