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"Gatsby le magnifique rencontre Donna Tartt". Philipp Meyer, auteur du Fils. Orient, petite ville idyllique à la pointe de Long Island, est un lieu privilégié où le temps semble s'être arrêté. L'été, au grand dam des locaux, elle est néanmoins envahie de New-Yorkais fortunés, des artistes pour la plupart. Paul, un architecte quinquagénaire, y possède une superbe maison de famille, or l'été touchant à sa fin, il décide d'y accueillir un jeune homme turbulent, un certain Mills, orphelin en fugue au passé trouble pour qui Paul s'est pris d'affection.
C'est alors que des événements curieux viennent rompre la sérénité habituelle d'Orient : le corps d'un résident est retrouvé dans la baie, puis le cadavre d'une créature animale difforme. Dans ce huis clos inquiétant, cette carte postale où tout le monde se connaît et s'épie, tous les regards se braquent aussitôt sur le seul "outsider" : Mills. Alors que d'autres morts suspectes secouent le hameau, déclenchant la psychose dans leur sillage, Beth, une autochtone de retour après quelques années à Manhattan, demande son aide à Mills pour tenter de découvrir la vérité avant que tous les habitants ne fasse de l'adolescent le coupable idéal.
Entre rivalités des classes, relations paternelles ratées, vision désenchantée de Manhattan en miroir, Long Island prend la forme d'une aventure estivale tragique dans la veine de Patricia Highsmith. Une lecture à la tension folle dans un lieu isolé de tout.
RECOMMANDÉ PAR CULTURE-CHRONIQUE
Après “Manhattan people” Christophe Bollen nous propose une oeuvre possédant d’indéniables qualités littéraires servies par une excellente traduction de Nathalie Peronny – on ne dit jamais assez de bien du travail des traducteurs… “Long Island” est en effet un roman à l’écriture racée et aux descriptions somptueuses qui déborde dès les premières pages le lit du récit. “C’est ainsi que je découvris, Long Island : sur une carte routière, moi à l’avant de la voiture de Paul Benchley, toi pareil à un corps de femme flottant dans la baie de New York. Je m’étonne encore d’être le seul à voir un corps féminin dans la forme de cet appendice terrestre étiré le long du littoral - les jambes formées par la fourche des deux plages qui s’échappent chacune d’un côté, les hanches et la poitrine dessinées par les anses rocailleuses des parcs à huîtres, le crâne éclaté entre différents quartiers de New York.” L’écrivain a décidément du style mais son périmètre narratif ne s’éloigne guère de New-York pour le plus grand plaisir du lecteur français. Il faut dire que Bollen est l’une des figures phare de la scène culturelle new-yorkaise, critique d’art et de littérature mais surtout rédacteur-en-chef de la mythique revue “Interview” fondée par Warhol.
Orient est une petite ville située à la pointe de Long Island à une soixantaine de kilomètres de Long Island, c’est un lieu de villégiature pour une partie de la gentry New-Yorkaise. “Les New-Yorkais venaient avec leurs décorateurs, leurs jardiniers paysagistes et leurs pruniers importés du Japon, mais aussi avec leurs problèmes - entre autres, la criminalité.” Quand le corps d’un résident est retrouvé dans la baie la petite ville bascule dans un huis clos étouffant que Bollen peint avec un soin du détail psychologique tout à fait jubilatoire. D’autres morts suspectes vont rendre le climat d’Orient totalement irrespirable et voir émerger les vieilles querelles rassises, les rivalités de classes, les relations ratées et la vision désenchantée de Manhattan.
“Long Island” est un grand roman américain par un écrivain qui se pose désormais comme l’une des meilleures plumes de la côte Est.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)