Persona est le premier tome des Les visages de Victoria Bergman.
Gao, enfant venu d’ailleurs, recueilli sans un mot dans un train par une inconnue puis enfermé dans une pièce insonorisée. Il va rapidement devenir complice de son bourreau qui s’attaque à des enfants abandonnés, errants, sans papiers.
Un autre enfant assassiné, dont l’identité est inconnue, est retrouvé momifié à proximité d’une station de métro. Son autopsie révélera l’absorption massive d’anesthésiants et des centaines de cicatrices.
Jeanette Kihlberg, inspectrice à Stockholm est chargée avec
son équipe de ces deux enquêtes pour lesquelles il n’existe aucune pression des medias qui ignorent ces enfants qui n’ont pas d’existence légale, pas de parents à interviewer. Elle va cependant enquêter avec opiniâtreté.
Jeanette, fille et petite-fille de flics est affublée d’un époux, Ake, artiste-peintre qui pense être trop mauvais pour exposer.
Au-delà des problèmes financiers que rencontre le couple, la seule chose qui semble les retenir est leur enfant.
Sofia Zetterlund, psychothérapeute, a œuvré en Sierra Leone pour tenter d’aider, vainement, les enfants-soldats. Aujourd’hui, à côté d’une clientèle classique composée de chefs d’entreprises et de starlettes à coacher, d‘expertises commandées par la justice, elle est passionnée (obnubilée) par deux cas de dissociation de personnalités : Samuel Baï, enfant-soldat qui a tué à l’âge de sept ans et perdu le compte de ses meurtres à dix, qui présente une personnalité joviale, extravertie, et parfois une personnalité sombre, renfermée, violente. L’autre cas est Victoria Bergman…
Victoria a du satisfaire les besoins sexuels de son père, lui-même victime de sa propre mère et de son frère très tôt, sous le regard passif de sa mère. Ces viols et d’autres traumatismes ont créé une personnalité fragmentée (une petite fille qui faisait ce que son père lui demandait mais qui savait sourire et avoir un regard franc, confiant en l’avenir sur les photos d’école).
Tous ces fils, et d’autres que vous découvrirez car il faut absolument lire ce livre, initiés très habilement par les auteurs vont se rejoindre doucement : Jeanette et Sofia vont faire connaissance et devenir proches dans le cadre de l’enquête sur les 2 premiers meurtres.
Les troubles de la personnalité de Victoria Bergman constituent le cœur de ce roman ; s’il semble qu’elle vive plusieurs vies bien distinctes, elle parait maîtriser parfois le passage de l’une à l’autre mais à d’autres moments, notamment lors des consultations avec Sofia Zetterlund, les personnalités semblent se mêler.
Jeanette est pour sa part la colonne vertébrale, la référence du lecteur, l’élément sain que l’on suit dans ses démêlés avec Ake à la maison mais aussi avec sa hiérarchie, le Procureur semblant couvrir une des personnes suspectées.
Les auteurs ont su créer un climat très particulier d’angoisse, de menace qui va croissante, de révélations horribles mais aussi poignantes qui va au-delà d’un thriller classique en dévoilant le très intime de Jeanette, Sofia et Victoria.
Si on retrouve parfois quelques traits du polar nordique (une social-démocratie dans le doute, une intrigue qui se noue dans la durée), c’est cette atmosphère particulièrement noire et terrifiante, ponctuée de scènes d’extrême violence physique et/ou psychologique, qui fait l’originalité de ce roman, mélange ingénieux de sophistication (les fils et les rebondissements sont nombreux), de passages poignants notamment lorsque les sévices sur les enfants sont évoqués, de brutalité, d’urgence, d’oppression, roman qui parait à la fin de ce premier tome magistralement construit.
Un concurrent solide face à la suprématie de Millénium!!!
7 ans après le succès planétaire de « Millénium », suivi par la lame de fond Lackberg, Actes Sud frappe à nouveau un grand coup avec ce 1er volet des « Visages de Victoria Bergman ».
Aujourd'hui, en Suède... Des enfants, tous immigrés clandestins, disparaissent dans l'indifférence générale avant d'être retrouvés morts quelques semaines plus tard, atrocement torturés.
Dès les 1ères lignes, nous sommes happés par la subjectivité multiple de la meurtrière, dont on découvre très vite et à travers, soit ses souvenirs, soit les confidences qu'elle livre anarchiquement à sa psy, qu'elle a subi depuis sa prime enfance l'innommable. Mais qui est vraiment Victoria Bergman?
Grâce à une trame narrative suggestive et habilement construite autour de l'éclatement de la personnalité de la jeune femme, nous plongeons dans une intrigue hypnotique, de la Sierra Leone où des enfants sont dressés à tuer, jusqu'aux quartiers chics de grandes villes suédoises où des notables cachent les pires vices derrière le masque de la respectabilité.
Un premier volet qui se dévore littéralement, et qui nous laisse abasourdi par ses spectaculaires revirements de situation. Du très, très grand art !!!