A priori, Ethan Muller, galeriste et marchand d’art new-yorkais, n’a pas du tout le profil d’un héros de roman policier traditionnel. Pourtant, c’est bien lui qui se retrouve au centre de l’intrigue des « Visages », qu’il raconte lui-même. Comme il le précise dès le début du roman, « je ne porte pas de flingue ; je ne suis pas coutumier des bagarres ou des courses-poursuites en voiture ». Ainsi, lorsqu’il découvre dans l’appartement d’un homme mystérieusement disparu des milliers de dessins incroyablement originaux, il décide de les exposer. Jusque là, rien de spécialement
intriguant, ce qui confère au roman une certaine lenteur au démarrage. Ce n’est que lorsque qu’Ethan Muller est contacté par un ancien policier que le suspense apparaît : ce dernier lui apprend en effet que les visages des chérubins qui forment le centre du tableau sont en réalité des portraits d’enfants, assassinés des années auparavant, dont les meurtres demeurent irrésolus. Lorsqu’Ethan décide de mener l’enquête, assisté de Samantha, procureur et fille du policier, l’intrigue devient palpitante. De courts « Interludes », qui racontent le passé de la famille Muller, s’intercalent au milieu du récit d’Ethan ; peu à peu, ces « Interludes » prennent le pas sur le récit du marchand d’art pour aboutir à la résolution finale de l’enquête, dans une atmosphère de plus en plus sombre.
Les amateurs de romans policiers traditionnels seront déçus par Les Visages : pas de meurtres sanglants qui rythment les chapitres, pas ou peu d’immersion dans le monde de la police, pas de fin trépidante avec prises d’otages ou courses poursuites avec le tueur. Cependant, cela n’enlève rien au talent de Jesse Kellerman. L’écriture est fluide et modérée ; l’auteur pèse chaque mot mais il n’en ressort aucune lourdeur. L’écriture permet admirablement de pénétrer dans l’esprit du « Génie », Victor Cracke, l’auteur des dessins, par l’alternance entre le récit personnel du galeriste, et les « Interludes » racontées par un narrateur extérieur.
Malgré la froideur des personnages, et l’éventuelle déception que l’on peut ressentir à la fin, en comprenant le pourquoi du comment, Les Visages reste un thriller très original, qui plonge son lecteur dans le monde de l’art, et dans l’histoire d’une famille désunie hantée par un lourd secret.
L'art et ses mystères
Très peu habituée des polars, j'ai pris un grand plaisir à lire Les Visages. Une intrigue finement ficelée avec des personnages attachants et de bons rebondissements malgré quelques longueurs lors des flash-back (que l'on comprend au dernier tiers du roman).
Une lecture très agréable, somme toute.