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La compréhension d'autrui est à la fois courante et nécessaire, puisque tous les actes sociaux la présupposent et que la société ne pourrait exister sans elle. Souvent évidente, car on comprend sans peine que l'autre pose une question, manifeste de la colère, cherche à faire plaisir, exécute un certain travail, etc., elle devient vite douteuse lorsqu'on commence à se demander ce que l'autre pense vraiment, ce qu'il veut vraiment dire ou ce qu'il cherche vraiment à accomplir.
Poussé à l'extrême, ce doute peut devenir ravageur en laissant penser que le sentiment de compréhension ne serait qu'une illusion interprétative ou un effet fonctionnel de l'habitude. Pour y faire face, on doit s'interroger sur ce qui rend possible la compréhension d'autrui : repose-t-elle uniquement sur une analyse des signes visibles du comportement ? Est-elle identique à celle que nous avons des phénomènes physiques ou du mouvement des animaux ? Ces études de sociologie compréhensive examinent différentes théories de la compréhension, de Weber à Goffman et Garfinkel, en passant par Descartes, Husserl, Habermas et Elisabeth Anscombe, pour aboutir à l'idée que les êtres humains se comprennent à partir de ressources sémantiques essentiellement communes.
Nous pouvons comprendre autrui parce que nous lui prêtons en principe notre propre compétence à comprendre le sens des actes, des sentiments, des relations sociales, des rôles ou des vertus de même que nous lui prêtons la capacité de saisir le sens d'une opération arithmétique. Cette capacité sémantique commune est toutefois sous-utilisée, car nous nous contentons souvent d'appréhender la troisième personne, voire la deuxième, sous les catégories les plus manifestes ou les plus fonctionnelles.
C'est pourquoi la compréhension d'autrui ne garantit pas encore la prise en compte de sa personne quoiqu'elle en soit toujours la condition.