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Les Etats modernes ont instauré des mécanismes juridiques
complexes pour régler l'appartenance ou non d'un individu à
l'Etat-nation. Denis Scuto analyse la construction de la
nationalité luxembourgeoise, du Code civil à nos jours, en
dégageant les influences des législations belge, française et
allemande. Bien loin de se limiter au seul cadre
luxembourgeois, une telle approche "enrichit notre réflexion
sur les différentes formes prises par la construction de la
nationalité en Europe à l'époque contemporaine" (Gérard
Noiriel).
Mais les questions de nationalité ne se réduisent pas à
l'aspect législatif ; elles sont intimement liées aux pratiques et
aux discours relatifs aux migrations et aux migrants. Faut-il
leur ouvrir ou non l'accès à la nationalité ? Que ressentent
"ceux d'en bas", ces étrangers qui ont cherché à obtenir la
nationalité luxembourgeoise ? L'étude sociale de centaines de
dossiers de naturalisation révèle à la fois leurs motivations et
leurs espoirs.
La "nationalisation" de la société au XXe siècle
politise fortement la question, devenue désormais l'enjeu
d'intérêts contradictoires. L'industrialisation, la
démocratisation de la vie politique et la mise en place d'une
législation sociale y introduisent la question des bénéficiaires
de ces droits nouveaux. Les débats sur le droit du sang ou le
droit du sol révèlent une dialectique entre ouverture et
fermeture, politique identitaire et politique d'intégration, qui
souligne l'héritage du passé.
Un défi fondamental se pose
aujourd'hui aux pays qui, comme le Luxembourg, connaissent
une forte immigration depuis la fin du XIXe siècle : comment
englober par le droit de la nationalité le plus de personnes
possibles dans un projet politique et sociétal d'avenir commun
?