Le livre s'ouvre et se referme avec le personnage de Molly, un être à part, elle traverse tout le roman comme une étoile filante, dégageant un magnétisme troublant pour son entourage. Dans cette période, déjà difficile, de l'adolescence, elle va avoir une aventure fugitive avec un père de famille. Se sentant déjà différente, elle va pourtant prendre de plein fouet un rejet généralisé au sein même de sa famille, pourtant « cette espèce d'ostracisme sidéré n'était pas grave », elle éprouve toujours un certain détachement. Alors que, de son côté, elle est capable d'évaluer
un homme en moins de cinq minutes, de leur côté les hommes « ne cesseraient jamais d'essayer de pénétrer un mystère qu'ils n'avaient aucune chance de comprendre ». De plus, cette place de paria qu'on lui assigne, va devenir un mode de vie, elle existe désormais dans la marge, elle se veut presque invisible, en fuite permanente. Elle va même jusqu'à éprouver de la douleur qu'on puisse se soucier d'elle, elle n'éprouve pas vraiment de l'amour, mais une seule fois, « une envie éperdue d'être normale ».
L'auteur opère une coupure en alternance dans la narration, pour présenter un autre personnage qui travaille dans le milieu de la publicité, on va suivre un moment crucial de sa carrière, sa rencontre avec un personnage emblématique de ce milieu qui lui propose de travailler avec lui. Ce gourou cherche à opérer un rapprochement entre les pratiques artistiques et la culture de masse, les objets ou les entreprises à promouvoir passant au second plan, la publicité devenant elle-même une oeuvre d'art à part entière. L'auteur leur oppose le discours de la contre-culture à travers les personnages d'un cinéaste et de deux universitaires activistes. Cette collusion entre art et publicité est un discours typiquement américain, alors que l'Europe a une culture ancestrale, « contrairement à l'Amérique; laquelle masquait son absence de racines culturelles sous la constante exaltation de la nouveauté, laquelle, au lieu de se soucier d'éternité, avait parachevé l'art d'oublier, de manière à pouvoir réapprendre les mêmes choses à l'infini avec un enchantement sans cesse renouvelé ». La lecture du roman m'a beaucoup fait penser à l'ouvrage d'Umberto Eco, La guerre du faux.
Les deux histoires vont se rejoindre, la troublante Molly créant le manque sur son passage, ne laissant aux hommes qu'elles croisent que la possibilité de constater cette perte et de résoudre l'aporétique de l'amour, entre maîtrise et autonomie, la singularité de cette jeune femme étant qu'elle se refuse à subir cette dialectique, pour elle « (…) il vaut mieux ne pas être aimée du tout que d'être aimée d'une manière qui n'est pas authentique ». L'écriture se déploie avec beaucoup d'aisance malgré sa densité, la description de la psychologie des personnages est très élaborée, la tentative d'écriture expérimentale sur le dernier quart du livre est superflue.
La fabrique des illusions
Le livre s'ouvre et se referme avec le personnage de Molly, un être à part, elle traverse tout le roman comme une étoile filante, dégageant un magnétisme troublant pour son entourage. Dans cette période, déjà difficile, de l'adolescence, elle va avoir une aventure fugitive avec un père de famille. Se sentant déjà différente, elle va pourtant prendre de plein fouet un rejet généralisé au sein même de sa famille, pourtant « cette espèce d'ostracisme sidéré n'était pas grave », elle éprouve toujours un certain détachement. Alors que, de son côté, elle est capable d'évaluer un homme en moins de cinq minutes, de leur côté les hommes « ne cesseraient jamais d'essayer de pénétrer un mystère qu'ils n'avaient aucune chance de comprendre ». De plus, cette place de paria qu'on lui assigne, va devenir un mode de vie, elle existe désormais dans la marge, elle se veut presque invisible, en fuite permanente. Elle va même jusqu'à éprouver de la douleur qu'on puisse se soucier d'elle, elle n'éprouve pas vraiment de l'amour, mais une seule fois, « une envie éperdue d'être normale ».
L'auteur opère une coupure en alternance dans la narration, pour présenter un autre personnage qui travaille dans le milieu de la publicité, on va suivre un moment crucial de sa carrière, sa rencontre avec un personnage emblématique de ce milieu qui lui propose de travailler avec lui. Ce gourou cherche à opérer un rapprochement entre les pratiques artistiques et la culture de masse, les objets ou les entreprises à promouvoir passant au second plan, la publicité devenant elle-même une oeuvre d'art à part entière. L'auteur leur oppose le discours de la contre-culture à travers les personnages d'un cinéaste et de deux universitaires activistes. Cette collusion entre art et publicité est un discours typiquement américain, alors que l'Europe a une culture ancestrale, « contrairement à l'Amérique; laquelle masquait son absence de racines culturelles sous la constante exaltation de la nouveauté, laquelle, au lieu de se soucier d'éternité, avait parachevé l'art d'oublier, de manière à pouvoir réapprendre les mêmes choses à l'infini avec un enchantement sans cesse renouvelé ». La lecture du roman m'a beaucoup fait penser à l'ouvrage d'Umberto Eco, La guerre du faux.
Les deux histoires vont se rejoindre, la troublante Molly créant le manque sur son passage, ne laissant aux hommes qu'elles croisent que la possibilité de constater cette perte et de résoudre l'aporétique de l'amour, entre maîtrise et autonomie, la singularité de cette jeune femme étant qu'elle se refuse à subir cette dialectique, pour elle « (…) il vaut mieux ne pas être aimée du tout que d'être aimée d'une manière qui n'est pas authentique ». L'écriture se déploie avec beaucoup d'aisance malgré sa densité, la description de la psychologie des personnages est très élaborée, la tentative d'écriture expérimentale sur le dernier quart du livre est superflue.