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Et si Jeanne d'Arc, "la bonne Lorraine / Qu'Anglais brûlèrent à
Rouen" était l'un des personnages les plus importants de notre
histoire ? Le 16 mai 1920, Jeanne est canonisée et le
gouvernement décrète que "la République française célébrera
annuellement, le 8 mai, la fête de Jeanne d'Arc, fête du
patriotisme". Cette unanimité n'est qu'apparente. Si on n'ose
plus écrire comme l'a fait Voltaire dans sa Pucelle (1672) que
Jeanne est "une idiote hardie qui se croyait une inspirée", elle
dérange.
Elle ne se laisse pas annexer à un camp. Sainte ?
Mais brûlée vive par l'Inquisition. Fille du peuple ? Mais elle
écoute Dieu et s'agenouille devant le Dauphin. Patriote ? Mais
icône de la droite nationaliste (Charles Maurras). On la célèbre
donc timidement : la nation a mauvaise presse parmi les élites,
historiens et politiciens. Que faire d'elle, qu'on ne peut réduire
à un jugement sommaire ? C'est Michelet qui a le mieux
exprimé la singularité de la plus grande des héroïnes
nationales.
"Elle est la simple fille des campagnes, du pauvre
peuple de France car il y eut un peuple, il y eut une France...
En elle apparurent à la fois la Vierge et déjà la Patrie", écrit-il.
On peut récuser le romantisme de Michelet. Il reste qu'au
moment peut-être le plus dramatique de l'histoire de France,
quand s'entrelacent guerre civile et guerre étrangère, une
inconnue a surgi et a conduit le Roi à Reims.
Vivante énigme,
mystérieuse créature" écrit Michelet de la Pucelle. C'est
"Jeanne la bonne Lorraine / Qu'Anglais brûlèrent à Rouen".
Elle avait 19 ans. Quand on oublie de la célébrer, c'est que la
France doute d'elle-même.