Biographie d'Annie Ernaux
Née le 1er septembre 1940 à Lillebonne, en Seine-Maritime, Annie Ernaux a grandi à Yvetot, en Normandie, où ses parents tenaient un café-épicerie. Issue d'un milieu modeste, elle poursuit cependant des études supérieures et devient agrégée de lettres. Elle enseignera à Annecy, puis au Centre National d'Enseignement à Distance. Son premier roman, Les armoires vides (1974), met en scène Denise Lesur, sorte de double de l'auteur, héroïne confrontée à un avortement.
En 1984 elle obtient le prix Renaudot pour La place, où elle revient sur la vie de son père. Annie Ernaux renonce très rapidement à la fiction pour s'attacher à l'autofiction, son écriture étant marquée par la présence du " Je ". Ainsi, elle évoquera son adolescence dans Ce qu'ils disent ou rien (1977), son mariage dans La femme gelée (1981), sa mère dans Une femme (1988) et la maladie d'Alzheimer de celle-ci dans Je ne suis pas sortie de ma nuit (1997), ses parents dans La honte (1997), l'attente amoureuse dans Passion simple (1992), son avortement dans L'événement (2000) (suite des Armoires vides), la jalousie d'une femme dans L'occupation (2002), son cancer dans L'usage de la photo (2005).
Une partie de son oeuvre est marquée par le clivage entre le milieu modeste et populaire dans lequel elle a grandi et le milieu bourgeois, " socialement supérieur " : " Pour moi écrire est profondément lié à ma situation sociale en tant qu'individu ". Ses ouvrages parlent aussi du féminin, sous l'angle de la sexualité et de l'intime.
Drame passé
Dans ce roman, Annie Ernaux continue d’explorer le sentiment de honte: honte universelle d’avoir désirée avec orgueil un homme et de s’être fait éconduire. Les faits se déroulent lors d’un séjour en colonie de vacances, où fraîchement sortie de la cellule familiale, elle était animatrice. Elle analyse cet état, longtemps refoulé en elle, pour l’introspecter avec la précision presque scientifique et la quête de vraie significative de son écriture, pour en exclure toute l’intensité et la densité. Elle nous livre ainsi une tragédie adolescente, reconstituée comme une enquête, qui nous dit comment même adulte, une blessure d’orgueil adolescente conserve tout son tragique. Ce roman parvient à mettre des mots sur l’intime dans ce qu’il a de plus douloureux, et touche ainsi à l’indicible.