En cours de chargement...
Remonter la Marne, "un voyage de retour", comme disent les ethnologues qui après avoir ausculté d'autres sociétés reviennent au pays pour l'explorer. Cette rivière, longue de 520 km, l'auteur l'a remontée à pied, depuis sa confluence avec la Seine jusqu'à sa source sur le plateau de Langres. Mince cordon nerveux situé trop près de la tête, Paris. " C'est là qu'il faut attaquer la maison France avec une chance d'en enfoncer la porte", a écrit Fernand Braudel.
Les catastrophes nationales surgissent toujours du côté de ce cours d'eau. C'est une France inconnue et inattendue que l'auteur a découverte. Au gré de ses rencontres, il a été envoûté par la France hors circuit, celle qui ne va jamais à Paris et s'en félicite, la France des "conjurateurs", toutes ces personnes qui, sans être marginales, sont sorties volontairement de la course. Ces personnages résistent, à leur façon, au pessimisme contemporain et conjurent les esprits maléfiques de l'époque : l'esprit de lassitude, la fascination pour la décadence, la tyrannie du consensus.
Voyage fragmentaire plutôt qu'inventaire, sorte d'extrait, comme on le dit d'un passage d'un livre ou de morceaux choisis, mais aussi d'un parfum concentré. Livre d'odeurs, de paysages encore intacts, d'églises désertes et de villages "démeublés" mais nullement moribonds. Seule la marche permet un rapport au temps, au silence, et le marcheur reste ouvert à l'aventure d'une auberge improbable, d'un barbecue dominical sur les berges ou d'un héron tout droit sorti d'une fable de La Fontaine.
Remonter la Marne, c'est retourner en arrière, un désir d'aller vers l'origine, comme on se remémore son passé.
La Marne...
La Marne...de la bataille ou des taxis du même nom aux guinguettes, un nom qui évoque à tous des images contrastées, et ce sont ces contrastes et ces atmosphères que l'on découvre au fil des pages.
L'on suit Jean-Paul Kauffmann sur son périple pédestre, sept semaines de marche et de réflexion, de la Marne urbaine à la Marne rurale, sur les traces de Jules Blain qui avait effectué une partie du périple dans les années 20 et l'avait raconté dans son "Voyage égoïste et pittoresque le long de la Marne" .
On déambule avec lui dans la petite et la grande histoire de cette région. D'odeurs en rencontres, de sentier de halage en bord d’autoroute, d'hôtel en écluse, d'île en dessous de ponts, on suit les images qui naissent dans l'esprit du marcheur solitaire, poèmes, romans, œuvres d'art ayant évoqué la Marne ou les lieux traversés.
La promenade se fait ainsi tantôt historique, tantôt tournée vers la faune, tantôt littéraire, tantôt sociale voir philosophique au fil des personnages croisés, marginaux, éclusiers, chien errant...
Un livre qui donne envie de prendre le temps, de contempler d'un autre regard zones péri-urbaines et autre zone livrée à l'urbanisation, et qui donne envie aussi de pousser plus loin la découverte de la Haute-Marne.