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Imaginez qu'un auteur ait produit une première œuvre qui ne serait composée que de citations plus ou moins déguisées, et qui n'aurait cessé pourtant d'apparaître à ses lecteurs comme absolument neuve. Il est fort possible que, travaillé par le repentir ou soucieux de retoucher cette œuvre qu'il jugerait ne pas être tout à fait sienne, celui-ci décide, à l'autre bout de sa carrière, de la récrire entièrement en refaisant une autre œuvre qui serait aussi sa dernière : elle se conformerait en tous points à l'image de la première, puisque menée en sens inverse, elle lui répondrait point par point, comme dans un miroir dans lequel serait apparu un revenant.
Vous aurez deviné que cette première œuvre faite d'emprunts multiples fut pour Jean-Paul Sartre La Nausée, et que l'œuvre qui s'enroule autour de celle-ci n'est autre que Les Mots, cet éblouissant récit de son enfance que l'auteur achève de rédiger à l'âge de cinquante-huit ans, et qu'on s'est empressé, depuis sa parution, de nous présenter comme une sorte d'adieu à la littérature, alors qu'il n'y est question, à vrai dire, que de son éternel retour.