« La vieillesse, ça ne sert à rien, sauf peut-être à apprendre aux enfants à profiter de la vie avant la liste d’attente pour la Résidence(...) L’entretenir en refusant de se souvenir d’hier pour mieux embrasser demain. »
Combien de fois, me suis-je posé, et je me pose la question en côtoyant la vieillesse, celle qui ne se passe pas forcément bien, celle qui fait peur ? C’est une réponse parmi d’autres, mais celle-ci me parle particulièrement….
« La vieillesse, est un trompe l’œil »
Que savons nos de nos vieux ? Les imagine-t-on avoir eu, une vie, des amours,
des rêves, des désirs, des passions, des tourments ?
Une 4ème de couverture assez mystérieuse, et la dernière phrase comme un appel que je ne saurais expliquer : il doit y avoir quelque chose dans ce livre là…..
Un grand merci à Babélio et aux éditions Au diable vauvert pour cette lecture délicieuse et tendre.
Nous avons Antoine, quadra divorcé, et remis en ménage, père, beau-père…mais surtout complètement largué, pas du tout remis de son ex, qu’il espionne, et pas vraiment avec sa nouvelle compagne. Antoine, a bien du mal à donner une direction à sa vie, et fermer des portes, pour en ouvrir d’autres.
Mouna n’est pas comme les autres : elle entend bien, se souvient de tout, voit tout, comprend tout, est lucide. Mouna, c’est la vieille dame digne, qui sait se tenir. Mouna, c’est la grand-mère que tout le monde a envie d’avoir.
« Mouna, se déplace en mode tortue, Mouna est une sorte de reptile sans carapace mais avec l’essentiel : un cerveau clean doté de toutes ses principales fonctions. Dans sa caboche c’est Usain Bolt. »
Il y a dans ce roman, des passages d’anthologie pour décrire la vieillesse, et, la vie en maison de retraite. Pour qui n’en a pas l’habitude, ne connais pas le milieu, les réparties peuvent paraître caustiques, provocantes. Elles sont le reflet d’une observation très fine, avec un brin d’impertinence, et un regard lucide sur ce qui nous attend tous, et toutes.
Et puis, un jour, Mouna demande à Antoine de l’emmener voir la mer….
Imaginez Antoine et Mouna filant à tombeau ouvert au volant d’une berline allemande.
Imaginez, Mouna, porte -cigarettes en ivoire à la main, faisant claquer les euros au casino…
Ces quelques heures volées, cette parenthèse enchanteresse passée au bord de la mer dans un hôtel qu’il n’a pas choisi par hasard, seront pour Antoine comme un rite de passage, et pour Mouna, le temps de la transmission, du partage, des secrets que l’on se dit, et de tous ce que l’on ne se dit pas, mais qui infuse de l’un à l’autre, et de l’autre à l’un…Il y a dans ces deux- là, un mélange d’amour et de tendresse qui touche, interpelle au-delà de ces deux personnages, qui me donne soudain un regard plus doux envers la vieillesse qui souvent me fait si peur.
Osez franchir les portes de la Résidence des Lilas, et aller à la rencontre de Mouna….
Un amour de grand-mère
Alors qu'Alice, son ex-femme, vient de se remarier en grandes pompes avec un riche trader, Antoine rumine son divorce et peine à s'investir dans sa nouvelle relation avec Laurence, une femme libre et épanouie, mère de trois garçons. Ses seuls bons moments, il les passe auprès de Mouna, sa grand-mère, qui a choisi de finir sa vie dans une maison de retraite. Empêtré dans ses tourments et ses contradictions, Antoine n'hésite pas une seconde quand Mouna lui demande de l'emmener voir la mer une dernière fois. Sans prévenir personne, il "enlève" la vieille dame et lui offre une escapade de deux jours sur la côte normande, dans l'hôtel où, plus jeunes tous les deux, ils passèrent de nombreux étés.
Un homme de 37 ans qui se morfond après un divorce, une vieille dame de 88 ans enfermée dans une maison de retraite...Tout cela pourrait être déprimant de prime abord mais ce serait sans compter sur la plume déliée de Xavier de MOULINS, le journaliste d'M6 dont j'ai découvert ici le talent d'écrivain. Il réussit, sur un ton décalé, une chronique douce-amère, à la fois légère et extrêmement juste. Mi-ironique mi-sensible, il brosse le portrait d'un homme d'aujourd'hui avec des problèmes d'aujourd'hui et d'une femme qui a connu d'autres temps, d'autres moeurs mais a su garder lucidité et gaieté.
A la modernité des thèmes (divorce, familles recomposées, garde alternée) s'ajoutent des questions universelles (la vieillesse, la mort, l'amour).
Tendres et touchants, Antoine et Mouna sont terriblement attachants. Je les ai suivis avec plaisir au pays des souvenirs pour une parenthèse enchantée où ils vont profiter de la vie et surtout se confier. C'est Mouna, dont l'essentiel de la vie est derrière, qui va aider son petit-fils à aller de l'avant en conservant seulement les bons moments du passé. L'amour qu'ils se portent tous les deux est simplement magnifique et leur relation donne à penser sur les rapports que nos sociétés entretiennent avec leurs "vieux".
Le style est moderne et enlevé avec quelquefois de géniales fulgurances, des petites formules qui font réfléchir sur l'amour, le temps qui passe, la vie et la mort. Les chapitres sont courts, le livre se lit très vite, pour moi le temps d'un dimanche après-midi pluvieux.
J'ai vraiment beaucoup aimé cette découverte de Xavier de MOULINS. Ce parfait ciel bleu est son deuxième roman qui fait suite à Un coup à prendre que je n'ai malheureusement pas lu. Cela n'a pas du tout gênée ma lecture mais, quitte à faire les choses à l'envers, je vais me précipiter sur le premier opus dès que possible.