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Deux fils narratifs s'entrecroisent dans le roman de Brian Castro Les Oiseaux de Passage : l'histoire de Seamus, notre contemporain, orphelin australien d'origine chinoise, mal dans sa peau, qui est à la recherche de ses racines : et l'histoire de Shan, jeune Chinois débarqué en Australie au milieu du siècle dernier pour y chercher de l'or et qui y trouvera surtout le racisme - mais aussi l'amour.
Confrontés chacun de son côté au sentiment tragique de la vie, les deux personnages vont se chercher l'un l'autre par delà l'abime du temps. Après maintes déconvenues, maintes péripéties, la rencontre quasi-mystique s'effectuera. Elle apportera à Seamus comme à Shan une réponse aux questions qu'ils se posaient, et donnera un sens à leur vie. Le roman s'appuie sur les "correspondances", au sens presque baudelairien du terme, entre l'odyssée du chercheur d'or et celle de son lointain descendant, qui, au terme de son enquête, finira par retrouver les traces où s'inscrit son identité et par la suite son destin.
Il fait alterner des épisodes d'un réalisme minutieux, qui font par exemple découvrir au lecteur la vie quotidienne dans un village chinois du dix-neuvième siècle, ou encore les difficultés que devaient affronter les chercheurs d'or, et des passages où prédominent l'onirisme, la perversion, l'étrange. L'écriture oscille, elle aussi, entre la verdeur spontanée d'une langue populaire et les raffinements d'une langue littéraire parfaitement maîtrisée, aussi subtile et forte que des calligrammes orientaux - ce n'est pas pour rien que Roland Barthes fait une brève apparition dans le récit.
Ainsi Brian Castro nous restitue-t-il une expérience où le tragique n'exclut pas l'humour et où l'incongru apporte du soleil dans la grisaille. Roman de l'aliénation surmontée, Les Oiseaux de Passage est une oeuvre vigoureuse et neuve, aux saveurs entêtantes et qui se déguste comme un banquet chinois. Xavier Pons