Troisième roman de l’Américaine Rebecca Coleman et premier publié en France, Quand nous étions heureux raconte l’histoire de Jill et Cade, jeune couple qui partage son temps entre études et job à Washington. Bientôt, Jill tombe enceinte et Cade se décide alors à lui présenter sa famille qui vit dans le New Hampshire. Jill est une jeune femme orpheline, elle a perdu sa maman, au passé alcoolique, quelques années auparavant et attend donc beaucoup de cette famille dont elle va faire la connaissance. Mais ce qu’elle va découvrir ne correspondra pas du tout à ses attentes puisqu’elle
débarque dans un univers familial complètement replié sur lui-même.
Rebecca Coleman dresse le portrait d’une famille américaine qui porte les stigmates des erreurs et autres secrets de son passé.
Ses personnages sont tous plus sombres les uns que les autres. Leela, la mère de Cade, éteinte, silencieuse, passe une grande partie de son temps à la création de drapeaux américains pour les familles de soldats. Le père, Eddy, est un homme monstrueux diminué depuis un AVC. Candy, la sœur aînée, très croyante assure l’éducation et l’enseignement à domicile de ses enfants. Elle est mariée à Dodge, un homme plus âgé qu’elle, violent et raciste, qui stocke à la cave en grande quantité les vivres nécessaires à la survie de toute la famille en cas de prochaine guerre mondiale. Elias, enfin, est le jeune frère de Cade, soldat rentrant d’Afghanistan qui ne parvient pas à retourner à la vie civile. Souffrant du syndrome post-traumatique, il passe son temps devant la télévision en journée et veille chaque nuit une arme à la main. A la différence du reste de la famille, Jill est sensible à la détresse de ce jeune homme perdu et cherche à le soutenir. Une relation ambiguë naît alors entre eux. Juste après l’accouchement de Jill, Elias se suicide. La famille déjà sérieusement malmenée sombre alors complètement.
Le rythme du roman est donné par des chapitres courts, relatant tour à tour l’un des personnages, son point de vue. Malheureusement, cette lecture a été difficile pour moi, certains passages sont trop longs presque ennuyeux car ils n’apportent pas toujours d’éléments intéressants au contexte et j’ai terminé avec une drôle d’impression, je m’explique : j’attendais davantage de la relation Jill – Elias, le survol rapide du sentiment amoureux qui semble bien naître entre eux m’a laissée sur ma faim. Il y aurait eu tant à dire… car une relation telle que celle-là est par définition non autorisée (ils sont beau-frère et belle-sœur) donc très intéressante d’autant qu’elle est décrite de façon très subtile. Il y a beaucoup de finesse de la part de l’auteure lorsqu’elle écrit autour de cela. Le sentiment arrive doucement, à pas de loup mais inévitablement. Malheureusement, il s’agit vraiment juste d’un survol. J’ai donc lu ce roman en attendant que ne vienne une autre tournure, avec l’impression d’avoir continué ma lecture en ayant cessé de croire en l’histoire de cette famille qui s’enfonce à chaque page encore un peu plus.
Néanmoins, il y a de la profondeur et de l’intensité à part égale pour tous les personnages. Pour ce qui me concerne, j’en aurais souhaité davantage encore pour Jill et Elias et peut-être un peu moins pour d’autres protagonistes comme Dodge, un homme complètement cintré dont il n’y a plus rien à espérer.
L’auteure soulève les difficultés, la détresse des soldats de retour au pays après avoir connu l’horreur de la guerre. Elle dresse le portrait sans concession d’une société américaine, incapable de réintégrer ses soldats à la vie civile, traitant leur mal-être à grands coups d’antidépresseurs, les laissant s’enfoncer au plus profond du désespoir, voire jusqu’au suicide. C’est terriblement douloureux, choquant, révoltant.
Pour être claire, il ne s’agit absolument pas d’une lecture détente. On n’entreprend pas ce livre si l’on cherche du réconfort, de l’espoir ou si l’on a le moral en berne, vous l’aurez compris. C’est une lecture particulièrement pesante : la descente aux enfers de cette famille a été difficile à supporter pour la lectrice que je suis. Et en cela, je ne peux que reconnaître le talent de l’auteure qui signe ici un roman très puissant.
Une famille bizarre...
Les premières pages nous narrent la rencontre entre Jill et Cade. Cela nous laisse envisager un avenir heureux. Mais Cade refuse de présenter Jill à sa famille. Mais Jill tombe enceinte et sans ressources, le couple est obligé d'aller vivre chez les parents de Cade.
La famille de celle-ci est assez bizarre et j'ai l'impression que personne ne se soucie de l'autre. La preuve la plus flagrante est Ethan, le frère de Cade, jeune vétéran qui rentre de trois ans en Afghanistan. Il est victime comme beaucoup de soldat du syndrome su stress post-traumatique. Pourtant personne ne s'en soucie et on le laisse s'enfoncer dans une dépression qui va le pousser au suicide. Pourtant j'ai trouvé que le sujet était juste effleuré et pas assez approfondi, de même j'aurai amé connaitre davantage Ethan car c'est le personnage le plus attachant du livre.
Je n'ai pas adhérer aux autres personnages comme Cade ou Dodge. Ce dernier est antipathique, raciste et en plus il force sa belle-famille à stocker des tonnes de vivre en prévision d'une guerre alors que cette famille n'en a pas les moyens. Cade, lui semble un être rationnel au départ mais après la mort de son frère, il plonge dans un délire de vengeance poussé par son beau-frère.
Jill, elle suit son compagnon et le père de son futur enfant en pensant qu'elle ne va rester que quelques mois. Elle est la seule à se soucier d'Ethan et va nouer avec lui une relation ambiguë. Elle voit son couple se dissoudre mois après mois et décide de partir en sentant que son compagnon ne tourna pas rond et prépare un mauvais coup. Elle a bien raison.
C'est une histoire qui nous plonge dans les extrêmes de l'être humain. Pourtant, le manque d'approfondissement du personnage d'Ethan et de sa maladie, m'ont laissé sur ma faim. J'ai apprécié cette lecture mais pour moi cette famille est trop bizarre pour être réelle (du moins j'espère !).