Comment peut-on diriger, interpréter la musique de Haydn, Beethoven, Schubert ou Mozart et collaborer quotidiennement avec le nazisme ? Richard Strauss, Carl Orff, Hans Pfitzner, Wilhem Furtwängler, Karl Böhm, Clemens Kraus, Elisabeth Schwarzkopf, Herbert von Karajan et les autres, savaient-ils que faire acte d'allégeance au IIIe Reich revenait à accepter pleinement l'éradication des juifs, des tsiganes, des malades mentaux, des communistes, des socialistes, des républicains, démocrates, pacifistes et autres opposants au régime ; savaient-ils que les émigrés de leur propre pays et de leur propre corporation se comptaient par dizaines de milliers ? La réponse est oui. Comme le miroir d'un passé qui aurait encore et toujours d'inquiétants reflets dans le présent, on sait que l'épuration et l'exode massif de l'intelligentsia allemande à partir de 1933 fut prémonitoire des charniers à venir ; alors, aujourd'hui, l'artiste - le musicien - qui aurait tendance à banaliser son environnement idéologique au nom d'une mythique "tour d'ivoire", ne peut ignorer que non seulement cette tour fut la première à S'effondrer, mais que son effondrement ne sera qu'un vaste prélude à l'obscurantisme.