Esztena, disparue dans Paris, s'est évanouie de son pays natal de Fels, qu'elle a peut-être fui. Son cousin, parti à sa recherche, l'imagine endormie chez un prétendu comte belge qui, espère-t-il avec délices, la garderait prisonnière. Le " comte ", ou plutôt son compagnon, le cynique Audin, mène le trop innocent narrateur aux portes d'un autre menteur, qui prétend, lui, faire écouter aux survivants les gémissements des morts dans les caves d'un pavillon de banlieue.
Comme s'il relisait pour soi les pages d'un journal intime, inscrites dans un ailleurs mythologique, le narrateur s'obstinera à suivre d'autres voix : celles, sourdes, qui occupent ses rêves ; et n'aura de cesse d'appréhender la distance qui les sépare de la réalité. Solidaire, il s'abandonnera peut-être au comte pour rejoindre, dans l'ivresse, Esztena, en son lieu de disparition, à moins que ne survienne le silence d'un sommeil définitif.
Dans ce roman, qui signe une réconciliation attendue avec l'art perdu de la fable, l'imaginaire à l'œuvre se fait promesse d'une singularité littéraire. Sommeil est le deuxième roman d'Anne-Sylvie Salzman après Au bord d'un lent fleuve noir (éd. Joëlle Losfeld, 1997).