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Les pages que Husserl a consacrées à l'art et à la conscience
esthétique sont rares et éparses. Il n'en reste pas moins que la
théorie qui y voit le jour fait preuve d'une grande
systématicité. L'oeuvre d'art, comme elle le sera plus tard chez
Sartre, y est invariablement désignée au titre d'objet irréel.
Non qu'elle ne possède une effectivité matérielle qui en assure
la présence dans le champ de la perception et en constitue le
soubassement physique, mais, bien plutôt, qu'elle soit
illocalisable dans ce champ et irréductible à ce soubassement.
La raison en étant que l'objet d'art est un objet imaginaire qui
ne trouve dans la réalité dont il est fait que le moyen de s'y
objectiver et non celui de s'y individualiser. Son irréalité, il la
reçoit du regard "désintéressé", au sens kantien du terme, qu'il
appelle, de la visée intentionnelle particulière qui lui donne
d'apparaître en tant que "néant" ou "rien", comme se plaît à le
répéter Husserl.
C'est à retracer la genèse de cette conception
dématérialisée de l'oeuvre artistique et du type de conscience
qui l'appréhende que s'attache ce livre, non moins qu'à en
cerner les enjeux théoriques. Deux voies d'investigation ont
été privilégiées à cet égard. L'une, interne, s'efforce d'en
dégager la provenance et d'en saisir le statut au sein même de
la phénoménologie husserlienne. L'autre, externe, la confronte
à des théories esthétiques rivales et à la production artistique
dont elle a à rendre compte afin, par contraste, d'en faire jaillir
et d'en apprécier la véritable portée heuristique.
Le résultat est
que les catégories conceptuelles élaborées par Husserl pour
fonder son approche du phénomène de l'art et de l'intention qui
en prend acte s'avèrent, en définitive, sujettes à la critique.