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De ce témoin phosphorescent, Nicolas Rozier se fait à son tour le témoin. Dans une réaction en chaîne régénérante, il tend la main vertigineusement au Prevel intensément poète — celui qui retrouva chez Artaud ce "vertige né il y a des siècles et qui s'empare de mon vertige". Et par les moyens d'une prose noueuse, tendue comme une perche à quelqu'un qui se noie, Rozier dit simplement ceci : le nom de Jacques Prevel, inséparable aujourd'hui de celui d'Antonin Artaud, n'a pas encore atteint sa propre résonance.
Et pourtant ! Lisant Prevel pour la première fois, en avril 1946, Artaud y repère déjà des "revendications émotives qui viennent d'extrêmement loin". C'est que Prevel a aussi misé sur la passion du vivant. Ecoutons de plus près, écoutons vraiment : "je suis le donneur de sang", "je suis un homme à même l'infinité", "revenu des rêves et revenu des morts", "le monde agrandi soudain jusqu'à mon coeur", "le feu blanc de la lumière exsangue", "en dérive vers l'absolu".
Zéno Bianu