C'était le temps où Charles Cordier unissait l'onyx et le bronze

Ce pourrait être un "inventaire" à la Prévert : ... deux ou trois poètes, quatre ou cinq peintres, quelques scandales, un Empire "second" du nom, une République dite "troisième", un opéra "Garnier", un métro "Bienvenüe ", de très officiels "Salons", l'éblouissante lumière du soleil de Naples à Paros, de Boulak à Alger... C'est ce qu'en soixante-dix-huit années Charles Cordier, fils d'un aide apothicaire de la Grande Armée établi pharmacien à Cambrai, a connu avant d'aller saluer une dernière fois le soleil depuis le jardin d'une maisonnette perdue dans les hauts d'Alger.
Homme de passion (... et de peu de patience ! ) il s'est battu opiniâtrement pour faire revivre dans toute sa beauté native la sculpture telle que la connaissaient Phidias et Praxitèle quand ils osaient colorer les marbres et marier la pierre et le métal. Si, pour un musicien, il suffit de quelques feuilles de papier pour jeter sur une portée les notes d'un chef-d'oeuvre, le coût d'un buste, qu'il soit en marbre de Carrare ou en bronze patiné, représente toujours pour le statuaire un investissement très lourd...
qui peut ne connaître aucune limite si le créateur veut l'enrichir de dorures ou d'incrustations de pierres fines. Pour Cordier, admirateur passionné autant que fidèle de son "vénéré Maître" le grand Rude, les années se succéderont donc dans l'incessante recherche des fonds indispensables pour donner vie à ses exigences de beauté.