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En 1933, Jean Paulhan écrivait à André Gide : " Je ne serais pas loin de voir dans Cingria un grand écrivain. " C'était aussi l'avis de Claudel, de Ramuz, de Cocteau, de Max Jacob et de quelques autres. Quinze ans plus tard paraissait Bois sec Bois vert qui, aujourd'hui encore, est comme le microcosme d'une œuvre que son auteur dispersait autant par nécessité que par insouciance, mais qui s'est révélée avec le temps considérable, et d'une rare cohésion dans sa diversité.
Si plusieurs textes que réunit Bois sec Bois vert semblent ainsi relever plus ou moins du genre de la nouvelle (Xénia et le diamant), du conte fantasmagorique (Hippolyte hippocampe), de l'étude littéraire historique (Lou Sordel) ou archéologique (Le Comte des formes), ils appartiennent en fait comme les six autres au genre unique et indéfinissable que s'est créé le génie vadrouilleur de Cingria. Captant l'extraordinaire acuité de sensations d'un être qui n'ignora que l'indifférence, c'est la langue elle-même ici qui voit, fait voir, et promène délectablement le lecteur.
Avec son mélange d'élaboration fastueuse et de spontanéité déflagrante, elle nous restitue de la même façon le suc des temps anciens où déambulait l'érudition imaginative de l'écrivain, et la vibration des instants de ce monde que son regard toujours neuf et libre enregistrait pour les magnifier. " Je ne suis pas un nom ", a-t-il noté un jour, " il n'y a que la vie qui m'intéresse. " En retour la vie éclate dans tout ce qui demeure sous le nom de Cingria.
Faire feu de tout bois
Le livre le plus connu de l'inconnu Cingria, dont Jacques Réda ne cesse à juste titre de chanter la gloire secrète.
Impossible à résumer : dix textes pour lecteurs prêts à perdre pied. Sensibles au vertige, s'abstenir.
On trouve un portrait de l'homme par Jacques Chessex dans le catalogue d'une exposition qui lui fut consacrée par la BNF en 1984 (le scan est horrible, mais le texte admirable): http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k65325685/f29.image.langEN