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Rubén Dario est revenu au Nicaragua, sa terre natale, pour y
mourir. Celui qui a parcouru le monde, révolutionné l'écriture
de langue espagnole et fait figure d'idole pour la jeunesse de
l'Amérique latine se sait condamné par la maladie ; les excès
liés à la vie agitée qu'il a menée le condamnent. Il n'atteindra
pas les 50 ans. Il meurt le 6 février 1916 à Leon, dans ce
Nicaragua profond où il est né et a grandi, loin des feux des
capitales brillantes qu'il a connus.
Dario est l'exemple même
d'un écrivain surgi d'un des lieux les plus improbables. Il
s'affirme face au Monde avec un désir et une fringale sans
pareils. Il agit comme s'il voulait conjurer le sort, et assume
son existence comme on relève un défi. Parti de la province de
la province, il saura transformer sa marginalité en qualité et
parviendra à user d'une énergie débordante tant dans sa propre
course que dans la construction de son oeuvre.
A cette
impression de défi que laisse son existence, s'ajoutent la
vigueur qui marque l'élaboration de ses textes et l'affirmation
d'une originalité porteuse de rénovation pour toute une langue.
En 1888, il publie à Valparaiso son livre Azul qui le rend vite
célèbre dans les milieux artistiques du continent. Dario arrive
à détourner la langue espagnole, à lui donner une sonorité
nouvelle et des aspects encore inconnus.
Il chante le Monde
mais en saisit aussi la cruauté et le trouble ; il sait dire comme
personne la beauté en construction et les rêves qui
accompagnent un univers résolument tourné vers l'avenir. La
modernité de Dario a consisté à dynamiser une langue alors
engourdie, repliée sur sa tradition, enfermée dans son passé, et
à la mettre au service d'une mentalité qui a su saisir la
complexité de l'homme contemporain.
Venu du plus profond
de terres oubliées de tous, il élabore l'oeuvre littéraire de
langue espagnole la plus cosmopolite et la plus ouverte de son
époque.
Les textes de Dario sont à l'image de son destin :
intransigeants, intenses, incomparables.