En cours de chargement...
Quand elle a commencé à faire de la photo, j'étais un peu
sceptique. Ses premières oeuvres étaient très prometteuses et
elle prenait un immense plaisir à photographier ses amis, mais
je connaissais la chanson et je savais que la photographie est
un art d'une simplicité trompeuse. On a la chance du débutant,
puis on apprend les rudiments de la technique, quelques trucs
et astuces, et la spontanéité disparaît.
Mais ce ne fut pas son
cas. Sa technique n'est pas devenue irréprochable, même après
tant d'années, mais cela lui suffit. Alice prend rarement plus de
deux ou trois pellicules, par crainte d'abuser de la patience des
gens. Elle n'utilise aucune ficelle du métier, car elle ne les
connaît pas. Elle préfère photographier sans détours les
personnes pour qui elle éprouve de l'intérêt ou de la tendresse.
Le résultat est souvent remarquable. Elle n'a pas son pareil
pour les portraits. Nul doute qu'il existe aujourd'hui de grands
portraitistes dont l'oeuvre a plus de poids, mais la sienne est
unique en son genre. Ses portraits sont totalement innocents.
Les rares fois où je l'ai regardé travailler, j'ai été sidéré par son
absence de manipulation, par la façon dont elle se fondait dans
le décor pour s'effacer totalement.
Il arrive que certaines
photos me soient familières sans que j'aie jamais rencontré les
modèles. Quand je finis par faire leur connaissance, je suis
toujours stupéfait de voir à quel point le portrait m'en a dit
long sur la personne.