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Monologue d'un homme rongé par la maladie et assiégé par les pages d'un manuscrit qu'il n'a eu de cesse de reprendre au fil des ans, Agonie d'agapè est l'apogée d'une obsession vieille de quarante années. Ce livre, dont Gaddis a entrepris le chantier dès les années 1940, se voulait au départ "une histoire secrète du piano mécanique" : l'auteur des Reconnaissances et de JR comptait y développer une réflexion sur la mécanisation des arts et le déclin de l'artiste.
Parvenu au seuil de sa vie, après avoir repris puis abandonné ce projet à maintes reprises, Gaddis a renoncé à écrire l'essai sur lequel il travaillait pour laisser émerger à sa place une voix singulière, une voix faite de cassures et de glissements, une partition criblée de douloureux silences, et qui rappelle étrangement celle des narrateurs solitaires de Thomas Bernhard : un homme réduit à la parole, un naufragé qui, une dernière fois, s'insurge contre les puissances du faux et le règne des ventriloques.
Le chant du cygne
Publié après la mort de Gaddis, ce long monologue rageur et exubérant apparaît comme le testament littéraire de l'auteur où il tire à boulets rouges sur le divertissement ("cette quête du plaisir abrutie et trouble") associé à la science et à la technologie qui provoque la fin de l'art, de la culture.
Au fil du texte, le personnage crée par Gaddis disparait peu à peu, remplacé par l'auteur lui-même qui se dissout alors dans son œuvre. Magnifique réflexion synthétique des travaux, lectures et expériences de Gaddis, sa parole s'échappe inexorablement comme la longue hémorragie qui met fin à sa vie d'homme.