Adonis

Après Le Louvre, espace de l'alphabet à venir , Adonis signe chez Seghers un recueil personnel, méditatif, d'une intensité et d'une virtuosité saisissantes. En 2024, les éditions Seghers proposaient au lecteur de suivre les déambulations oniriques d'Adonis au coeur des galeries du Louvre, dans un dialogue fascinant entre l'Orient et l'Occident, les cultures antique et contemporaine, le mythe et l'histoire.
Inscrit cette fois dans le temps présent et dans le creuset bouillant des villes, ce nouveau recueil est composé de quatre textes distincts : " Tour Gambetta et Jardin Henri Régnault ", " Carnet de correspondances sur les états de Tanger et ses stations ", " Supplément sur la grotte d'Hercule " et " La croix de l'alphabet (divagation sur une lettre destinée à l'amie française toujours en exil au Liban) ".
Le premier texte, qui donne son titre au livre, nous entraîne à Courbevoie, à l'ombre des buildings et non loin de l'esplanade de La Défense, où vit le poète. " Chaque tour tendait son cou vers le ciel - peut-être pour mieux observer les astres - sauf la tour Gambetta : elle tendait ses bras pour traduire sa lumière en une libération de ce qu'elle est. (...) Que puis-je faire pour elle, moi, l'habitant de ses hauteurs ? ", s'interroge le poète en ouverture.
Ce poème, en forme de louange de l'exilé envers la République qui l'a accueilli, s'apparente à un testament poétique. Le vénérable ancien y contemple un monde déchiré, une humanité coupée de ses racines, oublieuse de ses grands maîtres, et s'inquiète d'une civilisation de l'instant, " un univers qui oscille et tremble ". Plutôt que de délivrer des vérités toutes faites, Adonis offre des questions existentielles, philosophiques, politiques, des images, lyriques et tendres, épiques et cruelles.
A l'heure du bilan, il garde foi en l'incarnation, le corps, en ce qui nous lie. " Seul l'amour le sait. / Seul l'amour se jette dans le feu qui enflamme l'eau. "