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Qui êtes-vous, Victor Segalen ? Et pourquoi, depuis si longtemps, me hantez-vous ? Breton. Brestois. Militaire, marin et poète. Cavalier émérite, marcheur infatigable, vous restez distant et troublant. En 1903, vous pélerinez sur les traces de Gauguin, aux Marquises. Deux ans plus tard, à Djibouti, sur celles de Rimbaud. En 1909, vous traversez la Chine et vous recommencerez. Puis vous vous risquez dans la Cité interdite de Pékin, derrière un séduisant jeune homme, amant de l'impératrice.
Vous résidez ensuite à Hanoi et achetez votre opium. Plus tard, vous mourrez dans la forêt du Huelgoat, loin de votre épouse et de cette autre femme que vous aimez. Quarante et un ans. Un peu tôt pour mourir. Ou se laisser partir - comme on glisse, la nuit, d'un paquebot dans l'océan. Cette fois, vos pas m'auront entraîné dans votre sillage. Mon souffle mélangé au vôtre dans le roman vrai de votre vie.
J. -L. C. L'écrivain-voyageur donne une chaleur romanesque à sa biographie du médecin-poète. Alexandra Schwartzbrod, Libération. Dans une belle et précise évocation de Victor Segalen, Jean-Luc Coatalem interroge le mystère et la nécessité de l'ailleurs. Patrick Kéchichian, La Croix. Prix Femina essai 2017.
Hors des railways
Si les écrits de Victor Segalen (1878-1919), pour l’essentiel publiés après sa mort - toujours pas élucidée, mais finalement assez romanesque, dans une forêt bretonne -, sont parfois « complexes, fin de siècle, élitistes », le récit de Jean-Luc Coatalem est très beau, limpide, poétique, comme d’ailleurs ses autres récits ou romans « voyageurs ». Ici il s’adresse directement à Segalen : « je vous ai aperçu la première fois, Victor, et c’était il y a longtemps… » comme dans une longue lettre très respectueuse, et ça donne une grande et belle tenue au récit.
Ce récit est un portrait de Segalen, pour ne pas dire une biographie, qui traite de ses voyages, de sa vie, des femmes de sa vie, de ses convictions, de ses travaux ethnographiques, de son œuvre poétique et romanesque. Et en cherchant ce qui le rapproche de Segalen, en mettant ses pas dans ceux de ce voyageur qu’il a pris pour mentor, Coatalem fait aussi un peu son propre portait. Leur rencontre est logique tant ils ont des points communs : bretons, Brestois, écrivains, voyageurs, la Polynésie, Gauguin, et la conviction qu’il n’y a de réel sans imaginaire, et « qu’il ne faut pas rester mais vagabonder » si possible hors des sentiers battus.