Mes Chers Vous,
Dans la voiture qui rejoint Paris depuis Molenbeek le 13 novembre 2015 se trouve Khalil. Sa mission est de se faire exploser dans le RER bondé après le match qui se joue au Stade de France.
Son rôle est de créer encore un peu plus de terreur dans une ville qui aura déjà été frappée trois fois par les autres occupants de la voiture.
Khalil est là parce qu'il faut bien être quelque part, parce qu'il a suivi Driss, son ami d'enfance.... parce que plutôt que de traîner des journées entières dans la rue, il a rejoint ce groupe de parole de la mosquée du coin.
Khalil
ira au bout de sa mission, entrera dans le métro et appuiera sur le bouton de sa ceinture d'explosifs... plusieurs fois.... et rien ne va se passer !
Pourquoi ? Que faire ? Où aller ? Que deviens-t-on quand on échoue dans sa mission ? A qui parler ?
"Je suis vivant alors que je devais mourir.
Ce sont les foucades du destin."
Khalil a pour signification "l'ami intime", "le confident" et c'est ce que devient Khalil pour le lecteur puisqu'il va lui confier la suite de sa vie.
Yasmina Khadra réussit le pari d'entrer dans la tête d'un terroriste, de décortiquer ses émotions, ses craintes, ses peurs, ses joies mais surtout, les changements que son esprit opère lorsqu'il est en contact avec ceux qui vont le convaincre de donner sa vie pour cause.
Sans aucun jugement de valeur, Yasmina Khadra donne vie à un jeune homme en rupture totale avec sa famille et la société qui n'aura d'autre volonté que de donner un sens à sa vie, et ce quelque soit ce sens !
Au fil des pages, Khalil provoquera de multiples émotions chez le lecteur : de la colère, de l'empathie, de l'affection, une volonté de le secouer ou de l'enlacer mais jamais, l'auteur de jugera et n'orientera vers le parti pris qu'il estime juste.
Grâce à son écriture fine, ciselée, au mot juste, Yasmina Khadra réussit à plonger en apnée dans la tête d'un terroriste et offre un texte fort, émouvant et singulier.
Un court roman qui bouscule parce qu'il gratte des plaies encore à vif !
C.
http://cecibondelire.canalblog.com/archives/2018/12/08/36928419.html
Les origines du mal
Qui d'autre que Khadra pouvait ainsi inciser dans le vif, avec autant de simplicité et de clarté ? En écho à "L'attentat", qui nous place dans la peau d'une victime indirecte d'un attentat, "Khalil" nous place de l'autre côté du miroir, avec un jeune homme radicalisé, et livré à lui-même après un attentat kamikaze raté à Paris, près du stade de France. D'errances en errances, en proie à la paranoïa, le jeune homme se questionne et interroge la (sa) foi et les (ses) motivations réelles qui l'entrainent lui et les gens qui l'entourent, notamment ses "frères", sur des pentes si dangereuses. Sujet risqué, d'autant que Khadra se place en avocat du diable, l'essai est pourtant bien transformé en un livre percutant, extrêmement sensible, qui amène à réfléchir et à se poser les bonnes questions sur nos sociétés contemporaines. Malgré ses travers dont il n'est pas dédouané, plus Khalil doute et plus il devient attachant, et on ne peut que compatir avec ce personnage, tout en ombres et lumières.