L'anticipation en littérature : aux origines du genre

À la fois genre littéraire et cinématographique, l'anticipation désigne une œuvre dont l'action se passe dans un futur plus ou moins proche. Les moteurs en sont généralement la technologie et la science-fiction, quoique cette dernière ne soit pas nécessairement requise.

Le contexte de naissance de l'anticipation

En tant que genre littéraire à proprement parler, l'anticipation apparaît durant la seconde moitié du XIXe siècle. Elle se veut comme la synthèse d'une rencontre entre le voyage imaginaire, le roman d'aventures, et l'idéal d'une société lisse et sans défaut.

L'écrivain Jules Verne (1828 - 1905) est traditionnellement considéré comme un pionnier de l'anticipation, notamment à travers son ouvrage De la Terre à la Lune, lequel voit le jour en 1865.

De manière large, l'anticipation met en avant les avancées scientifiques, et par ricochet, les transformations psychologiques et sociales (perçues comme conséquences inéluctables des progrès technologiques). Les thèmes récurrents du genre sont : les grandes catastrophes naturelles, les voyages dans l'espace, les extraterrestres, etc.

La fin du XIXe siècle a vu la montée en puissance des inventions "révolutionnaires", telles que l'électricité, le téléphone, la télévision et le phonographe (premier procédé de reproduction des sons), entre autres exemples marquants de l'époque.

Louis-Sébastien Mercier : le grand précurseur ?

Écrivain natif du siècle des Lumières, Louis-Sébastien Mercier (1740 - 1814) a publié en 1771 ce qui semble être la première pierre de l'anticipation. L'An 2440, rêve s'il en fut jamais, n'est pas un roman fantastique en soi. Il s'agit plutôt d'une critique de la société anté-Révolutionnaire, dont l'auteur stigmatise la décadence avec force. On y retrouve le programme de la philosophie des Lumières. L'An 2440 ne se déroule pas au fin fond de la galaxie, ni dans un royaume imaginaire. Le livre présente la vision idéale (selon Mercier) de ce que devrait être une société ordonnée, laquelle se reconnaîtrait au bien-être de son peuple... ainsi qu'à ses dirigeants soucieux de ce même peuple.

L'histoire est exposée comme une fresque temporelle, passant du XVIIIe au XXIe siècle, par le biais d'un sommeil qui durerait 670 ans. C'est l'unique aspect "science-fictif" de l'ouvrage de Mercier. Le terme français "science-fiction" ne s'impose officiellement que vers 1950.

Quand la réalité rattrape la fiction

En vous penchant sur le sujet, vous observerez que la plupart des situations ayant été "prédites" dans les romans d'anticipation prennent corps dans le temps. C'est partiellement ce qui transparaît dans la référence majeure du genre, à savoir le roman 1984 (Nineteen Eighty-Four) de George Orwell. Publié en 1949 dans son édition originale, il décrit une société sous le joug d'une "dictature totalitaire sans contrainte". Vous y remarquerez que l'auteur y anticipe l'effondrement de la langue et du vocabulaire, via un portrait figurant l'arrivée du langage SMS...

Un nouvel adjectif est désormais bien ancré dans le paysage, pour décrire quelque chose de similaire à ce qui est dépeint dans le livre : on parle alors de situation orwellienne.

Quid de l'utopie et de la dystopie ?

L'anticipation entend donner du futur un aperçu réaliste. Deux lignes directrices se dégagent : l'utopie et la dystopie. Dans le premier cas, le futur est envisagé sous un angle positif, correspondant à la société parfaite susmentionnée. En revanche, le second cas projette un avenir selon une perspective sombre. L'An 2440 est la première utopie reconnue, alors que 1984 est l'exemple le plus célèbre de la dystopie.

Les principaux piliers du genre comprennent notamment La Zone du Dehors de Alain Damasio, La Planète des singes de Pierre Boulle, ou encore Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley.

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