Luc Ferry a beaucoup travaillé ces dernières années la question du rapport entre la mythologie et la philosophie. Il ne cesse d’interroger les mythes ce qui peut paraître curieux à une époque où la technologie joue désormais un rôle de premier plan dans la vie des hommes. Il va sans dire que ce retour aux origines n’est pas un hasard dans la vie d’un homme qui a consacré l’essentiel de son oeuvre au travail philosophique. Comme il l’écrit fort justement : “ les grands mythes n’appartiennent pas seulement à la catégorie des “contes et légendes”, ils contiennent
des leçons de vie et de sagesse car ils proposent des réponses à la question la plus cruciale qui soit, celle qui fournira sa matrice à toute l’histoire de la métaphysique : qu’est ce qu’une vie bonne pour les mortels ? Leur étude, passionnante en elle même, constitue pour cette raison un préalable indispensable à toute réflexion philosophique”
“Mythologie et philosophie” est une manière de synthèse de l’ensemble des réflexions du philosophe sur le sujet. Il réexamine les grands mythes avec passion et exigence : L’Iliade et l’Odyssée évidemment mais aussi Gilgamesh, Prométhée et la boite de Pandore, Thyphon et les géants, Midas, Thésée et le Minotaure, Jason et la Toison d’or, Dyonisos, Persée Pyrrha, Deucalion, Oedipe, Orphée, Eurydice, Demeter et bien d’autres encore. Reste que cet ouvrage représente bien plus qu’une révision générale de la mythologie antique. Il pointe les différences entre mythos et logos. Comme l’écrivait en son temps l’historien Jean-Pierre Vernant, la philosophie ancienne “transpose dans une forme laïcisée et sur le plan d’une pensée plus abstraite, le système de représentation que la religion a élaboré. Les cosmologies des philosophes reprennent et prolongent les mythes cosmogoniques.” Comme le souligne Ferry les débuts de la philosophie grecque correspondent, d’une certaine façon à la sécularisation de la religion. La problématique du salut et de la finitude est préservée, mais les réponses proprement religieuses sont abandonnées au profit d’un discours qui se veut rationnel. “La figure du philosophe va émerger, différente de celle du prêtre : son autorité ne viendra plus, du moins en principe, des secrets qu’il détient, mais des vérités qu’il rend publiques, pas des mystères occultes, mais des argumentations rationnelles dont il est capable dans un dialogue platonicien”
Luc Ferry qui s’appuie sur le travail des meilleurs historiens de ces questions – Vernant, Vidal-Naquet, Cornford - met en évidence la lente transmutation de la pensée mythologique en pensée philosophique et/ou en pensée religieuse. Le philosophe revient sur l’idée qu’il y eu très tôt une proposition d’une pensée de salut sans Dieu. Cette proposition ne peut être forcément que philosophique. Ferry qui fut ministre de l’éducation nationale en son temps - épreuve redoutable pour un philosophe – fait finalement plonger les racines de la pensée laïque très loin dans le temps. Peut être tout simplement quand Ulysse refusa l’immortalité et l’éternelle jeunesse que lui proposait Calypso. A méditer après avoir éteint votre portable. Ce “Mythologie et philosophie” constitue un excellent livre de chevet et une magnifique occasion de cadeau pour toutes les personnes que vous estimez.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)
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Luc Ferry a beaucoup travaillé ces dernières années la question du rapport entre la mythologie et la philosophie. Il ne cesse d’interroger les mythes ce qui peut paraître curieux à une époque où la technologie joue désormais un rôle de premier plan dans la vie des hommes. Il va sans dire que ce retour aux origines n’est pas un hasard dans la vie d’un homme qui a consacré l’essentiel de son oeuvre au travail philosophique. Comme il l’écrit fort justement : “ les grands mythes n’appartiennent pas seulement à la catégorie des “contes et légendes”, ils contiennent des leçons de vie et de sagesse car ils proposent des réponses à la question la plus cruciale qui soit, celle qui fournira sa matrice à toute l’histoire de la métaphysique : qu’est ce qu’une vie bonne pour les mortels ? Leur étude, passionnante en elle même, constitue pour cette raison un préalable indispensable à toute réflexion philosophique”
“Mythologie et philosophie” est une manière de synthèse de l’ensemble des réflexions du philosophe sur le sujet. Il réexamine les grands mythes avec passion et exigence : L’Iliade et l’Odyssée évidemment mais aussi Gilgamesh, Prométhée et la boite de Pandore, Thyphon et les géants, Midas, Thésée et le Minotaure, Jason et la Toison d’or, Dyonisos, Persée Pyrrha, Deucalion, Oedipe, Orphée, Eurydice, Demeter et bien d’autres encore. Reste que cet ouvrage représente bien plus qu’une révision générale de la mythologie antique. Il pointe les différences entre mythos et logos. Comme l’écrivait en son temps l’historien Jean-Pierre Vernant, la philosophie ancienne “transpose dans une forme laïcisée et sur le plan d’une pensée plus abstraite, le système de représentation que la religion a élaboré. Les cosmologies des philosophes reprennent et prolongent les mythes cosmogoniques.” Comme le souligne Ferry les débuts de la philosophie grecque correspondent, d’une certaine façon à la sécularisation de la religion. La problématique du salut et de la finitude est préservée, mais les réponses proprement religieuses sont abandonnées au profit d’un discours qui se veut rationnel. “La figure du philosophe va émerger, différente de celle du prêtre : son autorité ne viendra plus, du moins en principe, des secrets qu’il détient, mais des vérités qu’il rend publiques, pas des mystères occultes, mais des argumentations rationnelles dont il est capable dans un dialogue platonicien”
Luc Ferry qui s’appuie sur le travail des meilleurs historiens de ces questions – Vernant, Vidal-Naquet, Cornford - met en évidence la lente transmutation de la pensée mythologique en pensée philosophique et/ou en pensée religieuse. Le philosophe revient sur l’idée qu’il y eu très tôt une proposition d’une pensée de salut sans Dieu. Cette proposition ne peut être forcément que philosophique. Ferry qui fut ministre de l’éducation nationale en son temps - épreuve redoutable pour un philosophe – fait finalement plonger les racines de la pensée laïque très loin dans le temps. Peut être tout simplement quand Ulysse refusa l’immortalité et l’éternelle jeunesse que lui proposait Calypso. A méditer après avoir éteint votre portable. Ce “Mythologie et philosophie” constitue un excellent livre de chevet et une magnifique occasion de cadeau pour toutes les personnes que vous estimez.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)