C’est le deuxième livre de cette rentrée qui s’ouvre par cette citation de Saint Augustin : « Nous ne pourrions pas rechercher un souvenir perdu si l’oubli en était absolu ». Il y a dans ce court texte d’abord un souvenir d’enfance, une image, un tableau : le sacrifice d’Abraham. Il s’inscrit dans l’histoire familiale à plusieurs époques alors un déménagement date son existence et le tableau préféré de Mara dans un capharnaüm éclectique qui contraste avec la nouvelle habitation, l’image accroit son emprise. Il fut plié pour rentrer dans une valise et sa surface en garde les stigmates. Il fut donc sauvé dans un premier temps parmi tous les autres puis abimé par ce transport puis la mère de Mara en hérite. Il devient ensuite « un rectangle blanc sur fond de poussière », une autre image, l'ancrage du souvenir. "Une image dans la mémoire ne se remplace pas ». Il y a sans doute une lecture à faire du sujet, du motif. Un retour sur son propriétaire, peut-être aussi une entrée matière comme celle de détails qui peuvent participer au chapitrage de cette enquête, une histoire dès le départ rappelons-nous tout aussi familiale. Il y a donc au début, la narratrice, une image ; ensuite, un personnage bien réelle au nom étonnant, presque amusant, Willibald ; puis, un tableau, un sujet, une époque, un exil ; puis, une autre époque, un déménagement, une mère, une enfant ; et puis enfin, un retour sur tout ça par l’image, l’écriture, l’enquête qui s’enchevêtrent maintenant encore dans un autre âge pour la mère et l’enfant. On dirait qu’il y a le même travail que celui du peintre ou d’un restaurateur, relever les couches, les sédiments, comprendre la composition et sa vie sans omettre celui de ceux qui l’ont gardé et regardé. Il est intéressant d’y ajouter quelques photos qu’on ne datera pas toujours et même d’en faire un livre original, inédit, un autre support qui ramasse l’ensemble. Peinture, mots, documents, photos ; en art contemporain, on appellerait ça un dispositif ; dans un livre, une proposition de lecture singulière qui peut-être pali à l’oubli par une mise en relation d’éléments éparts de nature et textures différentes. C’est peut-être le meilleur moyen de faire cohabiter un sacrifice, un exil, une renaissance, une image, une histoire familiale, un passé-présent comme un rébus sophistiqué pour adulte pour tenter de rassembler une mémoire intime et familiale. Une œuvre brève et singulière. Un beau travail éditorial.
C’est le deuxième livre de cette rentrée qui s’ouvre par cette citation de Saint Augustin : « Nous ne pourrions pas rechercher un souvenir perdu si l’oubli en était absolu ». Il y a dans ce court texte d’abord un souvenir d’enfance, une image, un tableau : le sacrifice d’Abraham. Il s’inscrit dans l’histoire familiale à plusieurs époques alors un déménagement date son existence et le tableau préféré de Mara dans un capharnaüm éclectique qui contraste avec la nouvelle habitation, l’image accroit son emprise. Il fut plié pour rentrer dans une valise et sa surface en garde les stigmates. Il fut donc sauvé dans un premier temps parmi tous les autres puis abimé par ce transport puis la mère de Mara en hérite. Il devient ensuite « un rectangle blanc sur fond de poussière », une autre image, l'ancrage du souvenir. "Une image dans la mémoire ne se remplace pas ». Il y a sans doute une lecture à faire du sujet, du motif. Un retour sur son propriétaire, peut-être aussi une entrée matière comme celle de détails qui peuvent participer au chapitrage de cette enquête, une histoire dès le départ rappelons-nous tout aussi familiale. Il y a donc au début, la narratrice, une image ; ensuite, un personnage bien réelle au nom étonnant, presque amusant, Willibald ; puis, un tableau, un sujet, une époque, un exil ; puis, une autre époque, un déménagement, une mère, une enfant ; et puis enfin, un retour sur tout ça par l’image, l’écriture, l’enquête qui s’enchevêtrent maintenant encore dans un autre âge pour la mère et l’enfant. On dirait qu’il y a le même travail que celui du peintre ou d’un restaurateur, relever les couches, les sédiments, comprendre la composition et sa vie sans omettre celui de ceux qui l’ont gardé et regardé. Il est intéressant d’y ajouter quelques photos qu’on ne datera pas toujours et même d’en faire un livre original, inédit, un autre support qui ramasse l’ensemble. Peinture, mots, documents, photos ; en art contemporain, on appellerait ça un dispositif ; dans un livre, une proposition de lecture singulière qui peut-être pali à l’oubli par une mise en relation d’éléments éparts de nature et textures différentes. C’est peut-être le meilleur moyen de faire cohabiter un sacrifice, un exil, une renaissance, une image, une histoire familiale, un passé-présent comme un rébus sophistiqué pour adulte pour tenter de rassembler une mémoire intime et familiale. Une œuvre brève et singulière. Un beau travail éditorial.