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Londres, 1960. Dans une ville rongée par le népotisme, le chantage et la corruption, surgit la Firme, le gang des frères Kray, une organisation criminelle qui, après avoir mis à feu et à sang les quartiers chauds de l'East End, a fait des jumeaux-tueurs des parrains du Milieu londonien. Mais c'est aussi l'avènement du British Blues Boom et du Swinging London qui feront de la capitale anglaise l'épicentre culturel de la décennie hurlante.
C'est dans ce contexte agité qu'émerge la scène de Chelsea, et ses figures emblématiques, Beatles et Rolling Stones en tête qui, s'ils fraient avec la crème de la jetset et le gratin de l'aristocratie, fricotent également avec les gangsters stars de l'East End. Tout ce petit monde ignorant que, tapis dans l'ombre, les services du MI5 veillent au grain. Le 12 février 1967, ladite surveillance débouche sur l'épisode du Redlands Bust, puis l'arrestation de Mick Jagger et Keith Richards.
Cette étrange affaire, mêlant drogues dures, soupçons de complot et un zest de satanisme, amorcera le déclin de l'âge d'or des sixties. En 1968, Donald Cammell et Nicholas Roeg voudront illustrer les dérives des late sixties avec Performance, un film devenu légende noire, et une oeuvre décrivant de façon très réaliste ce que personne n'avait jamais montré, la face obscure d'une époque mythifiée et les relations troubles des héros de la contre-culture.
STONES IN THE DARK - Gangs of London est un récit haletant où les destins de Reginald et Ronald Kray, David Litvinoff, Donald Cammell, Nicholas Roeg, James Fox, Anita Pallenberg, Brian Jones, David Snyderman, Kenneth Anger, Aleister Crowley, et des Majestés Sataniques de Mick Jagger se croisent au coeur d'une intrigue éclatée où la menace reste présente de la première à la dernière ligne.
Stones in the Dark une histoire incroyable pour une bio unique
Franck Buioni signe son œuvre la plus aboutie, et elle ne peut se comparer à aucune autre!
Quel point commun entre le blitz, five pounds, un gaucher, un sabre yakuza, La Dolce Vita, une manifestation de masse, des 78 tour-tours de Blues, un cavalier, Victor Hugo, le cinéma, et la mort d'un papillon ?
Entrer dans "Stones in the Darck", c'est prendre un train à grande vitesse et remonter le temps les cheveux décoiffés, ou hérissés façon punk, tant les personnes les plus invraisemblables se cötoient au coeur des situations les plus loufoques. Affichant un style aux allures mystiques et un vocabulaire prolixe, parfois polar noir et description quasi cinématographique, la trame nous donne l'impression d'entrer dans Le Bureau des Légendes. A la fois satire sociale à la George Orwell et récit rock, l'histoire décrypte l'époque et nous livre une vision complexe des sixties. Religieux, politiciens, bobbies, musiciens, cinéastes, lords, jet-setters, mafieux, barbouses, réactionnaires et opportunistes se côtoient dans un joyeux bordel, s'agitant sur les riffs rock-and-roll façon "Street Fighting Man". Des lyrics gravés au cran d'arrêt façon"Helter Skelter" tant c'est saignant.
Personne n'en sort indemne, si ce n'est le lecteur qui oublie calmants et tisane jubile à chaque page au coeur de ce labyrinthe construisant une mécanique implacable version "Le Limier". Seuls les plus malins finiront en front page du Daily Mirror.
Ce bouquin révolutionne le style biographique, car les Stones deviennent le prétexte pour raconter l'Histoire du rock et la sociologie de l'Angleterre des 60's. Néanmoins, vous en apprendrez bien plus sur eux que dans les innombrables bouquins déja consacrés au groupe. Vous vous sentirez à leurs côtés, en studios, ou dans les clubs du Chelsea Set, dégustant un acide en leur compagnie.
Chaque acteur du livre intervient tel un ruisseau rejoignant les autres, créant un fleuve violent qui emporte le lecteur par sa puissance. Le fil conducteur reste une époque qui aura pactisé avec le diable. L'opportunisme des uns et des autres est passé au crible par l'auteur. En revanche, comment est-il parvenu à monter un telle architecture tant le récit est dense et complexe?
No one is innocent but everybody walk in the dark !
On reste scotché sur le zinc du Garrison, la bouteille de Gin à moitié sifflée, et on demande au taulier, Franck Buioni, de nous cracher la suite tellement on est chaud bouillant, avec l'acte deux en préparation.
Greg DeFlore