Ode aux femmes d'action

"Une ode est un compliment qui a besoin de temps et d'espace. J'ai demandé à huit femmes qui me semblaient être des femmes d'action, de vivre pendant trois jours à leurs côtés ; je me déplaçais dans leur ombre avec un carnet, je notais. Nous discutions quand elles en avaient le temps. Qu'est-ce qu'une femme d'action ? J'ai choisi des femmes dont je sentais la fissure, un rapport étroit, mouvant avec la mort et la sensation d'être très vivante.
Plus que vivante ? Ces femmes ne s'épargnent pas, s'usent même, se débordent, s'épuisent, souvent joyeusement. Une intensité, une mobilité. Elles ne pensent pas à se protéger, n'y mettent aucune énergie. Mais s'exposent, passent d'une chose à l'autre extrêmement rapidement, se dévouent, s'ingénient, se mettent au service du proche et de la communauté, il n'y a pas de hiérarchie ; ne négligent rien, il n'y a rien de petit.
Elles jonglent. Avec ferveur, fatigue, irascibilité, candeur, gravité. Les avoir suivies de près ce fut une manière de chercher, d'ausculter ce qui en moi n'avait, de cesse de réparer, coudre le déchiré, enjamber le vide et la discorde, faire que tout tienne ensemble et en mouvement. En vie." Carol Vanni