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Nico et Lou Desbrogé cachent un drame familial au monde extérieur : leur fille adoptive a quitté la maison. Puisqu'elle est majeure, ils ne l'ont pas fait rechercher, mais son absence accentue l'incompréhension et le silence qui depuis longtemps brisent leur couple. Psychanalyste, Nico vient d'obtenir la direction d'un hôpital où il se heurte bientôt à de graves conflits sociaux. Il s'attache alors à une jeune stagiaire, Eva, et s'octroie une escapade avec elle.
Mais à l'aube, malgré son acharnement à ne rien laisser paraître, il l'abandonne et part au hasard en voiture. Après avoir tenté de joindre Lou par téléphone, il perd le contrôle de son véhicule... Dans ce roman, Anna Enquist retrace avec une grande justesse la dérive psychologique de ses personnages. Leurs sentiments, subtilement déviants, sont les clefs d'un univers familier et inquiétant, baigné de culpabilité protestante et de freudisme implicite.
Glaçant !
Tout d'abord, une petite mise en garde : autant vous pouvez lire sans crainte la quatrième de couverture de l'édition brochée, autant vous devez vous méfier de celle du format de poche qui raconte tout ! Un des grands atouts de l'écriture d'Anna Enquist étant la subtilité avec laquelle elle amène les révélations, tout effet est perdu par une lecture détaillée de cet argumentaire de l'éditeur...
Un couple d'une cinquantaine d'années vit dans une maison près des dunes. Elle se passionne pour le jardinage, tentant de faire émerger du sable toutes sortes de plantes, lui se remet au vélo et se jette à corps perdu dans le travail. Elle est enseignante, il est directeur de l'hôpital psychiatrique de la petite ville où ils habitent. Tout le mode semble s'y connaître, mais personne ne sait vraiment ce que vivent Nico et Lou, ni quelle ambiance sombre et pleine de ressentiment tisse leurs soirées.
L'auteur a la plume acérée lorsqu'il s'agit de décrire les petits gestes quotidiens d'une vie de couple ravagée, et ce qu'ils cachent. Tantôt du point de vue de Lou, tantôt de celui de Nico, tout se dérègle imperceptiblement, en mettant au jour tout ce que l'un et l'autre tentent de taire, et en fonçant vers une déflagration finale inévitable. C'est estomaquant, et on se surprend à avoir du mal à lâcher un livre aussi sombre, sans doute grâce à une forme d'humour noir subtil, un peu dans le style de Pascal Garnier, qui maintient à flot au-dessus de l'atmosphère neurasthénique, et grâce à une construction implacable. Et pourquoi le titre, Les porteurs de glace ? On le découvre au cours du roman, et l'image colle bien avec celle de ce couple éreinté et glacé à la fois.
Une superbe découverte que ce roman !