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À découvrir
C’est l’histoire d’un botaniste qui pense plus à ses fleurs qu’à sa fille.
C’est l’histoire d’un amour qui n’en est pas vraiment un.
C’est l’histoire de l’esclavage qui laisse des traces sur plusieurs générations.
Je me suis laissée emportée par cette histoire, terrible mais touchante, vibrante mais violente.
Une belle découverte !
Roman agréable à l'écriture élégante, David Diop réussit surtout à changer l'angle de vue occidental sur l'Afrique avec son personnage de botaniste français qui découvre l'Afrique à hauteur d'homme, les idées claires sans être un révolutionnaire. Et pour appuyer tout de même le propos anti-esclavagiste et multiculturel, David Diop peut se féliciter d'avoir écrit quelques belles formules.
Il donne ainsi à voir la réalité de l'esclavage et du rôle de chacun dans ce drame universel auquel l'européen donne sa dimension commerciale et internationale.
A mon sens, il manque pour
faire un grand roman des personnages plus touffu, une fin qui aurait pris plus de temps sur des considérations juste évoquées.
Au milieu du XVIIIe siècle, le naturaliste Michel Andanson choisit, pour ses explorations, de se rendre dans une région d’Afrique alors encore très mal connue des Européens : le Sénégal. Il y passa cinq ans, comme modeste commis de la Compagnie des Indes, et en ramena quantité d’observations géographiques et ethnologiques, ainsi que d’importantes collections botaniques et ornithologiques. Ruiné par l’insuccès de ses publications à son retour de voyage, il élabora avec Jussieu une nouvelle méthode de classification des végétaux, et se lança dans un gigantesque projet d’encyclopédie,
qui ne fut jamais publiée. Il mourut dans le dénuement, léguant à sa fille Aglaé sa passion pour les plantes et une montagne de manuscrits. Et aussi - mais là c’est l’imagination de David Diop qui prend le relais -, des carnets relatant une version beaucoup plus intime de son expérience sénégalaise.
Ressuscitant le botaniste sous les traits d’un jeune homme ouvert et curieux, que ses explorations amènent à remettre peu à peu en cause les préjugés raciaux de ses semblables, au fur et à mesure qu’il se familiarise avec la langue, les traditions et les croyances, enfin le rapport au monde des Sénégalais, l’auteur nous entraîne dans un fascinant et dépaysant récit d’aventures, bientôt tendu par le mystère d’une disparition et d’une quête. Car, nous voilà bientôt sur les traces d’une jeune Africaine, évadée aux abords de l’île de Gorée, alors que, promise à l’esclavage, elle devait, comme des millions d’autres au temps de la traite des Noirs, y franchir « la porte du voyage sans retour ». Fasciné par la légende qui s’est aussitôt emparée du destin de cette fille devenue héroïne pour les uns, gibier pour les autres, notre narrateur laisse un temps de côté la flore pour s’intéresser à cette Maram, sans se douter que les développements romanesques de cette aventure le marqueront à jamais.
Romanesque, l’histoire de Michel et de Maram l’est absolument. C’est en vérité pour n’en revêtir qu’avec plus de force une dimension résolument symbolique et éminemment poétique. Ce jeune Français, qui, animé par l’esprit des Lumières, s’avère capable de raisonner à contre-courant des préjugés de son époque pour apprendre à connaître et à respecter un autre mode de rapport au monde, et qui, pourtant, échoue, comme Orphée, à sauver Eurydice de la mort et des Enfers, et, de retour en France, s’empresse d’oublier le changement de mentalité entamé lors de son voyage pour épouser à nouveau sans réserve les plus purs principes matérialistes, illustre tristement ce que les liens entre l’Europe et l’Afrique auraient pu devenir, loin de toute relation d’assujettissement, si l’appât du gain avait cessé un temps de les dénaturer.
Finalement rattrapé par l’inanité de ses ambitions et de ses tentatives encyclopédiques de maîtriser le monde, le personnage principal prend conscience, sur le tard, de ses erreurs et de ses ambiguïtés. Trop tard, hélas, pour les victimes de l’esclavage, et pour le mal et la souffrance terriblement infligés. Mais pour mettre en mots, transmettre la mémoire, et, peut-être, espérer, un jour, un avenir plus humain entre Afrique et Occident.
La porte du voyage sans retour
Aglaé, fille de Michel Adanson, botaniste français du XVIIIe, trouve en héritage dans un secrétaire, un manuscrit de celui-ci.
Ayant choisi de divulguer post-mortem ce récit, Adanson raconte comment parti en expédition pour découvrir la flore sénégalaise, sa vie se trouva bouleversée par la recherche d’une femme, icône de la lutte contre l’esclavage.
S'inscrivant dans la lignée des récits des grands voyageurs du XVIIIe siècle, comme Bougainvilliers ou Buffon, Diop montre la vile cupidité qui a conduit à l'instauration de l'esclavage et le décalage entre siècle des Lumières et la servitude.
Un livre en tout point passionnant et humaniste.