L’histoire nous entraîne dans une Amérique en train de se construire, de découvrir les joies du progrès, de la technologie, du commerce libre, de la libre entreprise. Pour la famille Kopp, cette Amérique-là, est affrayante, elle heurte leur sensibilité d’Européens. Constance Kopp, la mère, veut protéger ses filles :
«Les démarcheurs étaient sales, nous disait-elle. Ils vendaient une marchandise de qualité médiocre qu’aucun magasin n’aurait proposée. Ils jetaient leur dévolu sur les personnes isolées à l’esprit faible. Tout ce qui les intéressait était de pénétrer
dans les maisons pour pouvoir revenir les cambrioler ensuite en l’absence de leurs occupants. Et en plus, ils avaient des puces.»
Amy Stewart décrit avec minutie la vie des soeurs Kopp dans cet univers dont personne, surtout pas leur mère, ne leur a donné les clefs.
Constance, la sage, Norma la fantasque, Fleurette l’ingénue, s’en sortent comme elles le peuvent.
Seules, dans un univers d’hommes, contraintes d’affronter Kaufman. Lorsque Constance va porter plainte au bureau du procureur de Hackensack, l’inspecteur Courter l’écoute à peine et elle doit insister pour qu’il enregistre ses doléances.
Le roman d’Amy Stewart nous montre comment l’héroïne s’éveille à sa conscience, comment elle passe du camp de ceux qui se résignent, comme sa mère, au camp de ceux qui se battent. Comment elle parvient à se libérer des vieilles contraintes pour faire face au danger qui menace son existence et celle de ses soeurs.
Effectivement, on peut regretter de ne pas trouver, dès les premières lignes, une héroïne «clefs en mains», déjà formatée dans son rôle de justicière, mais ce n’est pas le cas, la lente maturation de la personnalité de Constance nous offre de beaux passages de lecture.
Après la page 150, le récit prend une tournure nouvelle, privilégiant le rôle de Constance et la façon dont évolue la vision qu’ont d’elle les hommes qui l’entourent, le photographe LaMotte, son associé Hopper, et le shérif Heath.
En se confrontant à Kaufman et à sa bande, Constance Kopp et ses deux soeurs, soulèvent la question de la justice dans la société, de la connivence entre la police, la justice et les décideurs économiques, ceux-ci soient-ils des mafieux.
Le récit ménage de belles surprises et des rebondissements inattendus. Constance doit convaincre Norma et Francis que les trois soeurs peuvent affronter le danger en restant à la ferme. De plus, elle doit gérer la petite dernière Fleurette, qui s’enflamme de l’aventure qu’elles vivent.
Une belle histoire, ancrée dans son époque, qui évoque de façon à la fois réaliste et enjouée, sans complaisance aucune, le combat d’une femme pour faire reconnaître ses capacités à vivre de façon indépendante, à apporter sa contribution à la société.
Le sous titre de La fille au revolver pourrait être : La revanche de Constance-Amélie Kopp.
Un roman comme on voudrait en lire tous les jours.
La fille au revolver
Une famille de jeunes femmes hors du commun qui n'hésiteront pas à s'opposer à des bandits pour défendre leurs droits dans un monde où être une femme dans un univers masculin est difficile...Un roman réjouissant et enlevé!