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Après le Krach de 2008, après les plans de sauvetage mais aussi les banqueroutes étatiques et les flux de réfugiés jetés sur les routes d'une odyssée désespérée, il devient de plus en plus évident, dans les centres du capitalisme comme dans ses périphéries effondrées, que ce dernier se disloque. Alors que l'humanité se défait toujours en un océan d'une extrême pauvreté où flottent les derniers îlots d'une richesse obscène, on voit se répandre, et pas seulement dans l'Europe de l'ouest, une terreur faite d'exclusion, de démarcation et de verrouillage des frontières.
L'impérialisme de crise du XXIe siècle n'a définitivement plus les formes qu'il avait au XXIe siècle. A coup d'interventions militaires, de forces spéciales de drones et d'encampements des masses de réfugiés, il n'est plus un impérialisme d'inclusion, mais vise bel et bien l'exclusion. En se confrontant de manière critique à Carl Schmitt et Giorgio Agamben, Robert Kurz montre avec force qu'en ce début de XXIe siècle le système producteur de marchandises en crise apparaît désormais à visage découvert, comme un état d'exception mondial et permanent, qui a déjà tous les traits de la nouvelle barbarie qui vient.
Les délétères aventures du fétiche et leurs secrets.... (dernier épisode ?)
Ce livre est une grille de lecture sociale et géopolitique (prémonitoire en ce qui nous concerne, l'Etat d'Urgence étant décrété en France quelques douze ans après sa rédaction) qui met en lumière la désagrégation de la souveraineté accentuée depuis les années 1980 au prisme d'une « critique de la valeur » dont son auteur était un représentant majeur (fondateur du courant dit de la « Wertkritik » jusqu'à sa mort en 2012, auteur d’un grand nombre d’articles et d’ouvrages traduits dans plusieurs langues dont le « Manifeste contre le travail », Le « Livre noir du capitalisme », qui fut, en dépit de ses 850 pages, un best-seller en Allemagne -quelques-uns de ses ouvrages ont été traduits en français dont le dernier, un recueil d’articles intitulé « Vies et mort du capitalisme. Chroniques de la crise », publié aux éditions Lignes en novembre 2011.) .
« Barbarisation et anomie, décomposition totale et lutte de tous contre tous à tous les niveaux sont désormais partout » écrit son compatriote Anselm Jappe dans sa préface, « nouvel avatar de la pulsion de mort (..) à l'intérieur de la socialisation à travers la valeur : dans celle-ci, la croissance tautologique constitue la seule finalité primant sur tout contenu, alors que la satisfaction des besoins vitaux n'y figure que comme « effet collatéral ». ». Et « c'est la forme-droit (..) qui est en train de disparaître avec la forme-valeur(...) Cette dernière était liée au système fétichiste du travail abstrait et de la valorisation de la valeur, et le délitement de l'un va de pair avec la désagrégation de l'autre ».
Une démonstration implacable et terrifiante à laquelle on n'est pas obligés d'adhérer totalement mais qui conduit, tant sa puissance de persuasion est grande, à néanmoins remettre en question radicalement ce que devient notre « nomos démocratique » ; ça risque bien de s'avérer urgent car si on continue comme ça, le pire n'est décidément pas derrière nous au contraire : il est, selon Kurz, nécessaire d'envisager le camp de concentration non comme une anomalie de l'histoire, mais bien comme la « matrice cachée » (p71), « le nomos de l'espace politique dans lequel nous vivons encore ».... Glaçant.(à lire idéalement en parallèle : « le caractère fétiche de la marchandise et son secret », de Marx, extrait majeur du Capital qui éclaire et étaie les propos de Kurz, chez Allia.)