Un jeune Londonien de dix ans participe au casting, qui, en 1999, doit sélectionner le garçon qui interprètera Harry Potter au cinéma. A son grand désespoir, alors qu’ils n’étaient plus que deux candidats en lice, il n’est finalement pas choisi.
Il suffit parfois d’un rien pour que le destin bascule. Et pas toujours dans le bon sens, quoi qu’en dise le fameux adage sur le hasard qui fait bien les choses. Martin Hill, propulsé à portée de rêve par un extraordinaire concours de circonstances, se voit aussitôt ravir cette chance inespérée, alors que rien ne permettant de
le départager de son dernier concurrent, le choix qu’il faut bien opérer l’écarte définitivement. Se remet-on jamais d’avoir perdu le ticket gagnant au loto ? D’avoir raté l’embranchement décisif qui pouvait transformer votre existence au-delà de toute espérance ? La plupart du temps, « notre route unique n’offre pas le moindre accès aux chemins que nous n’empruntons pas », mais, pour Martin, bientôt témoin désespéré de l’inextinguible Potter Mania qui viendra notamment, au travers du merchandising, contaminer jusqu’aux objets les plus usuels de son quotidien, tout n’est, sa vie durant, que rappel cuisant de son échec et de ce qu’il a l’impression qu’un autre lui a volé.
Même si construit autour de multiples et bien réelles anecdotes liées à la saga Harry Potter, Martin Hill est un personnage fictif. Inventé à partir du plus impressionnant engouement collectif qui soit, phénomène de société exploité commercialement jusqu’à la lie, il est un puissant prétexte à bien des réflexions. Dans un monde mené par le culte de la performance et de l’image, où le bonheur s’affiche - et se réverbère à l’infini sur les réseaux sociaux - à grands coups de standards aussi vains que factices, ne finit-on pas par trouver la réalité bien plus terne et plus détestable qu’elle ne l’est, et par se laisser dérober le véritable bonheur d’exister, dissous dans la frustration et un absurde sentiment d’échec ? A envier tout ce qu’on nous fait miroiter comme désirable, à quantifier la réussite à l’aune de la notoriété et de la fortune, à ne se satisfaire que d’avoir plus que son voisin, n’en oublie-t-on pas de vivre, tout simplement ?
Mêlant un humour discrètement affleurant à son génie des petites phrases qui font mouche, David Foenkinos réussit d’une bien originale façon à nous faire comprendre, que cet autre que nous envions tant, est peut-être, bien souvent, juste caché au fond de nous-mêmes, incapable de se rendre compte de son bonheur et de sa chance. Coup de coeur.
Être ou ne pas être
S'il y a bien une chose dont je suis sûre avec ce roman, c'est que les nostalgiques d'Harry Potter prendront un plaisir infini en redécouvrant les débuts de cette saga phénomène. Du livre aux films, les sorties n'ont fait qu'engendrer le succès et imposer Harry Potter comme la vedette d'une nouvelle ère au détriment du reste.
En effet, dans ce roman, Foenkinos nous replonge dans une nouvelle ère littéraire et nous rappelle les débuts d'Harry Potter et la difficulté de JK Rowling à s'imposer en tant que figure féminine dans la littérature jeunesse.
On y découvre ainsi les débuts de JK Rowling en tant que chômeuse puis en tant qu'autrice à succès. Et finalement, tout le phénomène autour de Harry Potter entre les livres et les adaptations.
Seulement, pour certains, ça a été plus qu'un phénomène, c'était toute leur vie : celui d'un renouveau en tant que figure majestueuse : celle d'Harry Potter. Et dans ce roman, Foenkinos nous dresse le portrait d'un anti-héros qui avait tout pour interpréter la figure d'Harry Potter. Tout lui était prédestiné de son physique à sa vie personnelle mais la vie en a décidé autrement et il s'est vu placé au second rôle. Un seconde rôle qui a détruit la vie de ce personnage.
Pour lui, c'était ce rôle ou rien. Et à partir du moment où il apprend que ce n'est pas lui, tout s'effondre et on assiste à sa lente descente aux enfers dans laquelle tout le ramène à cet échec. Il a dû supporter ce calvaire, cette vie ratée tout au long de sa vie. Il n'y a pas d'autres mots pour décrire ce malaise, son malaise.
Finalement, le succès d'Harry Potter n'a pas fait que des heureux. Il y a des personnes qui ont dû supporter cet engouement, ce phénomène en silence, victime d'un malaise sociale et sociétal. Le bonheur des uns ne fait pas le bonheur des autres et dans ce roman Foenkinos n'hésite pas à créer ce personnage rejeté de tous mais surtout de lui-même pour montrer à quel point cette saga a bouleversé bien des vies aussi bien positivement que négativement et ce à travers toutes les désillusions d'un second.
« Numéro deux » est un très bon roman d'ambiance qui nous replonge indéniablement dans l'âge d'or où Harry Potter s'impose comme une littérature d'adulescence, une passerelle entre l'adolescence et l'âge adulte et où on se délecte de chaque anecdote nous rappelant un tournant phénoménal dans la littérature jeunesse. Mais pas que puisque Foenkinos n'hésite pas à explorer avant tout le sentiment d'échec et la place d'un second dans la société.