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On pourrait énumérer à loisir les créatures et personnages idiots auxquels le cinéma a offert les ressources de ses puissances - de figuration, d'incarnation -, ses vitesses et lenteurs, ses inventions et expérimentations: des Fioretti de Rossellini au prince Mychkine interprété par Godard dans Soigne ta droite, du Perceval de Rohmer au personnage de Wanda dans le film éponyme de Barbara Loden, de l'inspecteur Clouseau à mister Chance...
Continuellement engendré par sa propre manière, ne sachant être autre que lui-même. l'idiot est aussi celui qui, en vertu de ses défaillances mêmes, accède à une intensité de sensation, de perception et de pensée qui excède l'expérience commune. Si tous les arts ont intimement à faire avec l'idiotie, le cinéma est peut-être le plus idiot de tous, lui qui ne saurait avoir lieu sans recourir à une machine idiote, une mécanique qui n'a a priori d'autre pouvoir que d'enregistrer, de reproduire ce qui est là.
Se pencher sur la manière dont le cinéma appréhende l'idiotie du réel pour en faire la matière d'un récit, l'envisager comme un événement valant pour lui-même, sur lequel viennent buter les personnages ou avec lequel ils font mystérieusement corps, telle est l'intention qui a soutenu l'élaboration de ce numéro.