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Le mot hébreu pour "visage" est une forme plurielle: Pantin.
C'est dire comme le visage est à la fois ce qui regarde et ce qui
est regardé ; c'est dire à quel point on (re)connaît l'Autre dans
le visage que l'on voit, dans celui qui nous regarde, dans cet
entre-regards qui fait la relation humaine. C'est pourquoi le
visage ne se laisse jamais regarder comme une image, et c'est
peut-être le sens de la formule énigmatique de Levinas,
"l'éthique est une optique", qui revient à plusieurs reprises
dans ses écrits.
Dans un monde saturé d'images et de visages
dés-incarnés (publicité, écrans, foule), que reste-t-il de notre
responsabilité quand il s'agit de voir? Notre regard porte-t-il
encore en puissance la dimension éthique que lui accordait
Levinas? "Il n'y a pas si longtemps, il est arrivé quelque chose
à notre regard. L'expérience de la vision a changé. Le champ
visuel a subi une transformation radicale.
Les images sont
pourtant plus nettes que jamais. Le niveau des pixels ne cesse
d'augmenter. Mais cette acuité dissimule le fait que le sens de
la vue n'a plus de sens, que l'oeil est cliniquement mort." C'est
à partir de ce constat qu'Hagi Kenaan propose une autre
éthique du regard après Levinas.