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Drôle
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Inattendu
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XXIe siècle
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Limoges
Monsieur Martin dirige une petite entreprise familiale avec Didier, le comptable. Sa vie bascule lorsqu’il reçoit une petite lettre bleue " à trombine d’huissier, couleur comminatoire." En fait, ce sont sa mère et sa sœur Rosy qui lui demande de descendre à Limoges parce que son père est souffrant. Six ans qu’il n’est pas allé voir ses parents.
L’essentiel du récit se passe dans la tête du narrateur et il y en a " une petite somme de pensées qui défilent sous le capiot" de cet homme "aboutonné jusqu’au cou" sous un imperméable à la Columbo.
Comme vous pouvez le remarquer,
le narrateur est originaire de Laon et parle souvent en patois picard. Comme il aime bien aussi la Kwack ( Kwak est une marque de bière belge) et le whisky, inutile de vous préciser que ses pensées dérapent un peu.
C’est bourré d’humour même si parfois il est au détriment de ses pauvres parents âgés ce qui frôle l’irrespect.
" La mère tricote toujours des doigts, à vide, ben c’est pas demain la veille qu’on aura une écharpe, j’sais point où c’qu’elle a appris à manier l’aiguille à tricoter Maman, m’alors elle cesse pas de se triturer."
Mais l’humour est souvent une façade et Monsieur Martin se laisse glisser dans l’alcool, la luxure peut-être pour oublier la déchéance de ses parents, ce surcroît de soucis et de responsabilités.
La force du livre est de pointer derrière ce style humoristique de sujets touchants comme la vieillesse des parents, les chamailleries des vieux couple, la déchéance des corps , l’anonymat des accueils d’urgence, l’indifférence du personnel des hôpitaux.
" Les blouses qui passent avec quelqu’un dedans, les mains dans les poches, plaques appendues poche haute extérieure, quatre stylos plus pastel en cas d’arc-en-ciel, les galons bic en pochette."
Le narrateur est un être exceptionnel qui commence par nous faire rire puis finit par nous émouvoir.
" La vie c’est bien angoissant, c’est bien la seule maladie mortelle qui ne se soigne jamais."
Je ne m’attendais vraiment pas à ce genre d’humour en choisissant ce livre. Peut-être me suis-je laissée embarquer grâce à ce patois picard qui m’est un peu familier mais j’ai passé un très bon moment de lecture grâce à cet humour qui cache malgré tout une vraie détresse. Un seul reproche, l’auteur aurait pu être un petit peu moins bavard parce qu’avec un style si particulier certains lecteurs pourraient se lasser.
Drôle et tragique à la fois
Très bon roman. Etonnant dans sa forme, j'ai été emporté par le flot des pensées du personnage. Un homme ordinaire à la Monk ou Colombo qui vit en direct sa lente désintégration. Rudefoucauld est passé maître dans l'art d'extraire des mots une puissance littéraire et dramaturgique peu commune.