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Pour comprendre une religion, il faut penser dans la langue de ceux qui l'ont vécue. Jean Rudhardt essaie de suivre cette démarche, en étudiant un champ limité de la religion grecque. Noms communs, thémis, signifie à peu près l'équité, hôrai, les saisons, eunomia, la bonne organisation, diké, la justice, eiréné, la paix. Ces mots nomment aussi des déesses. Les modernes sont enclins à les tenir pour des notions divinisées.
L'étude des textes nous donne une autre vision des choses. Les noms de ces divinités ne signifient pas des notions mais des sentiments : ceux que l'homme éprouve quand s'imposent à lui les exigences de la justice ou de la paix, quand il en perçoit les effets dans l'enchaînement des événements. Pour la langue commune, ces noms signifient l'émergence d'une valeur dans les consciences ; pour la langue religieuse, ils ne signifient pas autre chose.
Le divin se révèle à l'homme dans cette émergence. Tel est le fait premier. La formation de concepts, celle d'images divines sont des faits secondaires. Cela reste vrai même si, pour chaque individu, l'aperception d'une valeur, la formation d'un concept ou d'une image sont toujours façonnées par une tradition.