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Si l'oiseau de Minerve ne prend son vol que la nuit, comme l'affirmait le philosophe Hegel, alors il était temps, tandis que ferment les puits de mine, de prendre la mesure historique d'une corporation autour de laquelle se sont noués les grands enjeux de l'histoire ouvrière et sociale du XIXe siècle. Les mineurs surgirent dans l'opinion parés d'une aura de rebelles et de forçats du travail à travers grèves et catastrophes.
Très vite, ils sont l'objet d'une surveillance particulière ; c'est à travers eux que la République naissante expérimente les stratégies sociales modernes : syndicalisme et lois ouvrières. Réussir avec les mineurs, pense-t-on à l'époque, c'est réussir avec la classe ouvrière tout entière, et se préserver de la révolution sociale. Il n'est pas étonnant que le mineur, redouté, mais célébré à la fois, donne naissance à une vaste mythologie : le mineur héros du travail, prêt au sacrifice de sa vie, et finalement bon enfant pour les patrons, la classe politique et le syndicat ; mais aussi avant-garde du combat ouvrier et révolutionnaire pour les socialistes, puis les communistes.
Ce livre restitue, à travers la toile de fond des grèves et des luttes, le jeu complexe des stratégies patronales, syndicales, politiques et étatiques, qui surent finalement apprivoiser et détourner les révoltes initiales contre l'oppression de la condition minière. Si cette histoire n'a encore jamais été rapportée, c'est sans doute parce que le récit mythologique de la mine reste largement tabou : n'a-t-il pas rendu maints services pour entretenir des équivoques sur l'histoire du mouvement ouvrier, tandis que la gauche politique continuait, par paresse ou par intérêt, à glaner quelques rentes dérisoires de la légende des mineurs...
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