Le policier Bélony vient de perdre son épouse, restée vingt ans dans le comas après un accident qui avait aussi tué leur jeune enfant. Meurtri, l’homme n’a pour autant guère le loisir de s’appesantir sur son malheur : un tueur en série s’en prend à des jeunes femmes de la ville, dont on retrouve les cadavres mutilés étrangement mis en scène. Il devient bientôt évident que le meurtrier observe et manipule Bélony et sa jeune collègue Dalençon, désormais conscients de faire partie d’un plan minutieusement programmé, dont ils ignorent les tenants et les aboutissants…
Changeant
de registre après plusieurs romans qui nous avaient habitués à l’âpre noirceur de ses drames ruraux, l’auteur fait une incursion dans l’univers du polar. Il nous livre une histoire encore une fois bien sombre, centrée sur un être qu’une enfance douloureuse, bâtie sur une tragédie, a brisé au point d’en faire un dangereux psychopathe. Assez simple, l’intrigue n’en ménage pas moins un gros effet de surprise totalement imparable. Et, emporté par la tension croissante du récit, l’on se laisse prendre avec plaisir à cette lecture indéniablement addictive.
Seulement voilà, malgré la mise en perspective des meurtres avec un passé tragique habilement suggéré, qui creuse d’insondables abîmes de souffrance sous la surface des pages, l’ensemble peine à se démarquer de la multitude d’histoires du même genre, qui se bousculent sous formats papier et télévisuel. Combien de duos d’enquêteurs, meurtris par la vie et liés par des sentiments mutuels plus ou moins inavoués, se sont-ils lancés sur les traces, semées de scènes gore, de tueurs en série acharnés à tourmenter de jeunes et jolies femmes sans défense ? Si Franck Bouysse réussit haut la main à accommoder la recette en une lecture fort agréable et distrayante, il ne parvient pas à la transformer en moment d’exception, comme il en avait pris l’habitude avec chacun de ses livres depuis Grossir le ciel. La faute à un thème rebattu et à un trop-plein de clichés, mais aussi à une crédibilité moyenne et à une plus grande discrétion de la beauté stylistique si remarquable de cet écrivain.
Quoi qu’il en soit, même si, selon moi, un cran en dessous des autres romans plus mémorables de l'auteur, ce polar, aussi bien écrit que construit, se lit avec plaisir. Il offre un agréable moment de détente, tout en révélant une nouvelle facette de l'écrivain.
En demi teinte
Pas le meilleur Franck Bouysse MAIS un superbe polar français tout de même...
Faire aussi bien que Né d'aucune femme relevait du prodige, pour cette nouvelle lecture il vous faudra oublier cette précédente lecture.
Orphelines c'est le roman qui fixe un peu plus le style et la plume Bouysse. Profondément poétique, toujours bien écrit avec une intrigue encore bien construite.
Il manque une petite pointe de quelque chose, comme un très bon plat auquel une pincée de sel supplémentaire ne serait pas de trop...
Cependant, je ne saurais que trop vous recommander de le lire, une vraie valeur sûre !