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" - A nous deux, ma belle.
Les relations affectives qui s'étaient établies entre le commandant et son cheval n'avaient rien de ces effusions dévoyées, de ces léchages de museau, de ces caricatures d'amour, de tous ces résidus pervers de sentiments humains qui président aux rapports des vieilles filles et de leur pékinois. C'était d'abord un combat, où la jument savait qu'elle succomberait, où elle désirait d'ailleurs succomber, une lutte qui commençait dans l'espièglerie, dans la ruse et se continuait dans la rage, pour se terminer dans une sorte de pâmoison soumise, de détente complète où l'un et l'autre trouvaient leur plaisir.
Milady était sa chose ; Gardefort l'avait découverte, il l'avait faite ; elle était sa gloire ; elle l'entretenait dans l'illusion qu'il comptait toujours, qu'il appartenait au monde des vivants, qu'il possédait encore tous ses moyens physiques et moraux, bien qu'il les eût, comme tout le reste, en partie perdus. "
Milady, mon amour
Enfin ! J’ai envie de dire. Enfin, j’ai lu cette nouvelle (66 pages seulement dans l’édition que j’ai empruntée). Dans le monde équestre, elle fait office de classique. J’ai connu ce titre à travers d’autres lectures, grâce à d’autres cavaliers et/ou Hommes de Cheval qui écrivent (Jean-Louis Gouraud, Jérôme Garcin…), aux références que faisaient certains magazines équestres… Je l’ai vu plus d’une fois sans le noter. Longtemps j’ai hésité à découvrir ce texte… J’ai osé avec la peur de connaitre l’histoire par coeur. Mais il fallait sauter le pas.
Il était grand temps que je fasse connaissance du Commandant Gardefort et de sa belle Milady. Il la façonne depuis sa naissance. Il la travaille chaque jour selon ses propres principes équestres.
Non de non ! Que j’ai aimé ce personnage dès les premières lignes ! Ce Monsieur qui a choisi sa ville et « son » Ecole (Saumur et l’Ecole de Cavalerie et du Train) au profit de sa carrière militaire. Son amour pour son poste d’Ecuyer au Cadre Noir a fini par lui coûter sa place mais ce n’est pas grave, au fond…
Que j’ai aimé ce personnage vivant une relation d’amour avec sa jument. D’ailleurs, si quelq’un sait quel grand maître prônait ce type d’équitation, cette légèreté…
J’ai adoré ce coup de coeur qu’il a eu pour cette jument de quatre ans, à priori banale. J’ai ri lorsqu’il demande le divorce… Son épouse n’était pas assez bonne cavalière. Je l’ai trouvé fou au moment du dénouement. Effectivement, il était fou… de sa jument !
D’abord publié en 1933, cette nouvelle est incroyablement bien écrite, terriblement juste. Jamais Paul Morand ne tombe dans le « trop technique » ou dans le sentimentalisme ou dans le misérabilisme… J’ai retrouvé Saumur à la perfection.
Un vrai chef d’oeuvre !
http://lireparelora.wordpress.com/2012/04/21/milady-paul-morand/