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Les Passants de Lisbonne
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Philippe Besson
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Il est difficile pour un lecteur qui a déjà été à Lisbonne et qui connaît un minimum cette belle capitale Portugaise au bord du Tage, de comprendre comment l'auteur a pu la dénaturer à ce point... Dans "Les Passants de Lisbonne", la ville devient étouffante, brûlante, avec des personnages qui se plaignent du ciel bleu et d'un soleil permanent ! La nuit, la ville est réduite à un cloaque sale, malveillant, où les touristes qui sortent dîner le soir, doivent se méfier des prostituées - essentiellement masculins - et des trafiquants de drogues. Certes, Lisbonne a ses travers tout
comme Paris a sa violence, mais étais-ce une raison pour étaler le tout dans ce roman ?
Philippe Besson parle de cette ville comme s'il ne l'aimait pas. Quand il complimente les mosaïques, - les fameux azulejos peints à la main - voilà que les couleurs criardes des maisons viennent tout gâcher. Quand il parle du cimetière anglais, c'est le regard froid et hostile des vieilles femmes voilées qui ressort. Les hôtels fastueux deviennent des prisons dorées, le vent venant du Tage n'apporte jamais assez d'air et la ville devient bruyante, assourdissante à rendre fous. Il est vraiment dommage de peindre un portrait presque agressif de Lisbonne - aussi bien en terme de couleurs, d'odeurs de poissons grillés, de paroles hautes, que de bruits de la circulation et du tramway - , alors que l'intérêt de cette ville - rare capitale au bord de l'eau - va bien au-delà d'un dédain de touristes...
Hélène a perdu son mari dans un terrible tremblement de terre qui a ravagé la ville de San Francisco, aux Etats-Unis. Folle amoureuse, elle n'arrive pas à oublier Vincent, dont elle n'a jamais pu récupérer le corps. En venant à Lisbonne, - qui ressemble architecturalement à San Francisco et qui a elle aussi connu un tremblement de terre violent en 1755 - Hélène essaye de reconstruire sa vie et de se dire qu'elle peut avancer. Et pourtant, elle choisit une ville qui lui rappelle celle où son mari est décédé - à défaut de pouvoir s'y rendre physiquement.
Au fil des pages, on découvre une femme anémiée, anorexique, froide, égocentrique et qui n'hésite pas - c'est peu crédible - à parler de sa vie personnelle et de ses douleurs à un inconnu. Alors même que c'est une femme d'ordinaire taciturne qui ne se mêle pas à la foule et n'aime pas s'exposer... Malgré sa douleur, il est difficile pour le lecteur d'avoir de la peine pour elle, autrement qu'à certains moments profondément touchants. Le reste du temps, elle tourne en rond en parlant toujours de la même chose, ponctuant sa tragédie d'horribles pauses qui font buter le lecteur.
L'histoire de Mathieu, le Français qui connaît bien Lisbonne et n'est pas là par hasard, n'est pas plus intéressante. Cet homme, dont il est difficile de dresser un portrait, n'arrive pas à oublier sa brutale rupture avec Diego, un Portugais avec qui il est resté cinq ans et qui l'a quitté avec froideur en lui laissant une lettre de rupture. La relation à distance entre Paris et Lisbonne était devenue trop lourde pour lui. Tout espoir s'envole alors pour le lecteur, d'espérer que Mathieu et Hélène vont finir ensemble, pansant ainsi leurs blessures. Mathieu est bisexuel, - plus homosexuel - noctambule qui fait la tournée des bars et des prostituées dans les ruelles de la ville.
D'emblée, ce personnage dérange le lecteur. À travers la plume de l'auteur, - car tout au long du récit, on sent bien que c'est Philippe Besson qui parle, accordant peu de crédibilité et de place à ses personnages - Mathieu devient un fin analyste, prêt à percer l'armure de la maigre Hélène. Il a ce côté irrévérencieux, comme s'il faisait semblant de ne rien demander, alors qu'il meurt d'envie de connaître tout ce qui a bien pu arriver à cette pauvre femme. Le récit piétine, car quand on croit avancer et enfin s'approcher de la vérité, d'insupportables suspens viennent tout gâcher. Au final, Mathieu est aussi froid qu'Hélène, n'arrivant pas à rendre crédible son histoire d'amour avec Diego, fantôme d'un passé qui n'intéresse pas le lecteur...
L'ensemble se mélange et devient donc confus, parce que finalement, nous n'arrivons pas à savoir si les personnages veulent se livrer ou pas. Quel est leur but ? Êtres écoutés, pouvoir se plaindre pendant des jours en toute légitimité, parce que la personne en face est aussi malheureuse ? Ressasser leur malheur jusqu'à fondre en larmes, se suicider ou bien enfin pouvoir aller de l'avant ? Sans omettre le manque de crédibilité à leur rencontre, ces discussions forcées et impromptues qui nous amènent à nous demander où est l'utilité.
Enfin, le style d'écriture de Philippe Besson nuit aussi gravement à son histoire. Il a quelque chose de très travaillé, comme s'il avait mis de longues minutes à choisir chacun des mots, déballant toute une série de synonymes qui apportent de la lourdeur au texte - déjà pesant en raison de la chaleur de la ville dont il est sans cesse question. L'écriture est artificielle, fausse, comme si tout ceci était une farce ou un exercice de psychanalyse. Ce n'est pas écrit avec naturel, c'est psychologique, scientifique, retirant tout ce qu'il y a de léger et d'envoûtant dans la lecture d'un roman. Ce livre - et c'est le comble ! - n'est pas du tout dépaysant !
Dans un même temps, le style est plat. L'ensemble laisse une sensation d'effort, de travail difficile à mettre en place, d'énergie usante. Comme si l'auteur était vraiment au cœur de la ville, accablé par le soleil. Malgré lui, il arrive à faire ressentir une sorte de lassitude, regrettant presque la froideur et la noirceur de Paris. C'est un beau gâchis, appuyé par le caractère omniscient de la narration qui décortique les moindres pensées des personnages, gâchant le plaisir de lire.
Philippe Besson
Hélène et Matthieu, deux français, se rencontrent dans un hôtel de Lisbonne, attirés par la solitude et la douleur qu'ils devinent chez l'autre. Pour quelques jours, ils vont se lier d'une amitié qu'ils savent temporaire, qui leur permettra de se livrer, de parler du deuil ou de la rupture dont on ne se remet pas, de vider leur sac devenu trop lourd.
Un roman intimiste, plein de sensibilité et de justesse sur le manque de l'être aimé.